Critique : El Limpiador

À Lima au Pérou, une épidémie foudroyante s'est propagée en ville provoquant la mort des habitants. Découragées et démunies face à ce virus incurable, les personnes jusqu'à présent épargnées semblent attendre leur tour.

Ce tableau tragique est sublimé sous le regard du réalisateur péruvien Adrian Saba qui réalise ici son premier film. À travers de longs plans séquences illustrés par une photographie somptueuse aux couleurs froides, on se glisse peu à peu dans le quotidien d'Eusebio, un homme chargé de déblayer les rues encombrées par les cadavres. Seul et prisonnier d'un monde qui se déshumanise, notre nettoyeur semble comme les autres avoir renoncé à vivre. Jusqu'au jour où il découvre un jeune garçon orphelin, réfugié dans le placard d'un appartement déserté. Grâce à cette rencontre, le film prend alors une toute autre direction. L'infection ne sera pas l'axe principal, mais plutôt le contexte dans lequel leur histoire peut se dérouler. 

El Limpiador impressionne d'abord par la justesse de son propos et par une solide maîtrise technique. On sent le réalisateur soucieux, jusque dans la composition minutieuse de ses cadres, de communiquer par l’image plutôt que par les dialogues et d'apporter par surcroît une esthétique visuelle différente au service du récit. De ce fait, chaque plan est chargé de sens, comme lorsque le garçon marche dans les rues de Lima avec un carton sur la tête pour se protéger de la mort. De même que le rythme lent et le peu de dialogues sont à l'image de deux personnages renfermés sur eux-mêmes.

Du peu de moyens dont il disposait (le budget était faible et principalement financé avec l'aide du crowdfunding), Adrian Saba redouble d'inventivité et propose une mise en scène riche et d'une grande intelligence. Avec la volonté de transmettre une certaine poésie dans la solitude, l'ensemble est une réussite et assure un début très prometteur à ce jeune cinéaste.