Un grand-père infréquentable et gaffeur se retrouve avec un petit fils qu'il ne connaît pas, le temps d'un improbable road trip. Voilà le point de départ du nouveau film estampillé « Jackass », emmené par l'inoxydable Johnny Knoxville, roi de l'expérimentation tordue comme du canular craspec, propulsé momentanément au sommet de la chaîne alimentaire MTV. Largement oublié du public mais toujours désireux de continuer ses happenings déviants, le Johnny nous revient plus motivé et maquillé que jamais avec une comédie parfois jouissive mais qui ne sait hélas jamais où donner de la tête.
En effet, Bad Grandpa se présente à la fois comme une comédie classique avec ses personnages, un semblant d'intrigue, plusieurs arcs narratifs potentiels et une succession de saynètes composées essentiellement de caméras cachées, où le duo de comédiens s'efforce de surprendre ou dégoûter d'innocents quidams. Cette ambivalence est le gros souci de ce qu'on a finalement bien du mal à qualifier de film, tant le réalisateur Jeff Tremaine se désintéresse rapidement de la structure de son récit. La relation entre ce vieil homme indigne et l'enfant qui l'accompagne n'évolue pas ou très artificiellement, la logique qu'induit le choix même du road trip est totalement ignorée. Par conséquent, les sketchs s'enchaînent et se ressemblent, puisqu'ils sont tous conçus sur le même schéma paroxystique, sans compter que la complexité étonnante de certains met à mal la suspension d'incrédulité du spectateur.
Reste que l'on rit souvent et grassement. Voir les testicules d'un vieillard atterrir sur le nez d'un strip teaser ou un pet foireux foutre le boxon dans un petit restaurant trop tranquille reste pour tous les amateurs de couillonnerie une source d'infinis plaisirs. D'autant que Knoxville ne lésine ni sur le jusqu'au boutisme, ni l'aspect tendancieux de certains de ses exploits, notamment ceux mettant au centre du dispositif le môme qui l'accompagne, insupportable et hilarant. Doté de matières premières aussi dévastatrices que son sens de la provocation et la malice de ses complices on eut vraiment aimé que le cerveau de l'entreprise tranche entre cinéma narratif traditionnel et enfilade de sketchs, car en l'état, si l'on rit souvent, on a quand même le désagréable sentiment de payer une place de cinéma pour assister à une sélection de vidéos Youtube.