Before Midnight : Critique

Melissa Blanco | 21 juin 2013
Melissa Blanco | 21 juin 2013

C'est dans l'incertitude - et le coeur lourd - que nous avions laissé Jesse et Céline, il y a neuf ans à Paris. Que s'est-il passé depuis ? Jesse a-t-il pris son avion pour les Etats-Unis ? A-t-il abandonner son quotidien pour les bras de cette petite française, rencontrée une décennie auparavant ? Après le dyptique Before Sunrise et Before Sunset, le cinéaste Richard Linklater retrouve ses comédiens et scénaristes Julie Delpy et Ethan Hawke avec la volonté de redonner vie à des personnages qui firent leurs renomées. Before Midnight, c'est ainsi la promesse de renouer le contact avec de vieux amis, de retrouver un couple de cinéma qui nous fit vibrer vingt ans plus tôt.

Après l'Autriche et la France, c'est en Grèce que nous donne rendez-vous les deux amants, en vacances pour quelques jours. Ensemble depuis leurs retrouvailles parisiennes, Jesse et Céline ont fondé une famille, construit une relation sur le long terme. Une consécration pour les afficionados de la saga, témoins privilégiés de leur première rencontre. Et le film de constamment jouer de cette complicité singulière entre les personnages et le public, dans l'évocation de vieux souvenirs communs.

 

 

La singularité - et la force - de la saga repose ainsi sur la volonté d'ancrer l'histoire du film dans une dimension parallèle à notre propre existence, de jouer sur l'illusion que Jesse et Céline ont effectivement vécu leur histoire pendant que nous vivions la nôtre. Neuf ans se sont écoulés depuis notre séparation mais leur vie ne s'est pas pour autant arrêtée. Parce que le quotidien a désormais pris le pas sur les milliers de kilomètres, leur relation a inévitablement évolué. Finies l'insouciance de la jeunesse et l'inquiétude de la trentaine, place au quotidien, aux problèmes d'ex-femme, d'enfants, de couple. Jesse et Céline n'ont plus le temps de penser pour deux, se sont, comme les autres, inévitablement laissés happer par la routine. Si les premiers épisodes isolaient les personnages - chaque épisode se construit sous la forme d'une discussion en temps réel, durant une journée -, Before Midnight les confronte au contraire au groupe, à trois couples d'amis, miroir involontaire de leur propre passé, présent et futur. Autour d'un verre de vin, on disserte de l'amour et de la mort, du temps qui passe, de la solitude de la vieillesse, de la frivolité de la jeunesse, avec ce même détachement, ce même ton qui faisait la saveur des premiers épisodes. Puis le film d'opérer un doux virage, de soudain permettre aux personnages de se retrouver à deux, le temps d'une escapade.

 

 

Magnifique film sur la relation amoureuse, Before Midnight évoque (invoque ?) inévitablement Voyage en Italie de Roberto Rossellini, film somme sur le délitement et la mort d'un couple Par un ton volontairement plus grave, symbole même de la maturité des personnages, Jesse et Céline s'interrogent sur ce qui fait encore les fondements de leur relation. Ne se sont-ils pas trop accoutumés au quotidien ? Qu'est-ce qui fait encore leur singularité ? Que laisseront-ils derrière eux ? Et la légèreté des débuts de laisser place à une sorte de résignation. Reposant quasi exclusivement sur l'alchimie entre Julie Delpy et Ethan Hawke et un délicat sens du dialogue, Before Midnight bouleverse profondément - et durablement - par son abandon du romantisme au profit du réalisme, moins rose, plus cruel. Il est désormais temps pour Céline d'accepter le fait qu'elle ne trouvera probablement jamais mieux que Jesse, avec amertume mais peut être pour le meilleur.

 

Résumé

Sans volonté de clôre la saga, Before Midnight se termine comme il a commencé, avec l'illusion d'une vie qui continue et dont nous reprendrons peut être des nouvelles, dans quelques années. Du moins, l'espérons nous.

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