Critique : Le Chasseur

Jérémy Ponthieux | 13 janvier 2013
Jérémy Ponthieux | 13 janvier 2013

Voilà un film bien étrange que ce Chasseur victime d'une sortie directement en vidéo en France. Etrangeté du décor australien bien sûr, avec ses majestueuses forêts et son silence sauvage. Mais saugrenue impression surtout que celle qui assaille le spectateur lors du générique de fin, mélange d'étonnement et d'un zeste d'amertume. Tout part d'un pitch fleurant bon la série B : un chasseur solitaire se voit confier l'improbable tâche de tuer le tigre de Tasmanie, espèce que l'on dit déjà disparue de la faune mondiale. L'origine de cette demande est pour le moins obscure et reste une rampe de lancement efficace à la mutation psychologique qui ne va pas tarder à assaillir ce chasseur expérimenté. A la rencontre d'une localité hostile et surtout d'une famille endeuillé d'un père disparu, Martin David va se questionner, se détourner de sa mission première et s'attirer diverses sources d'ennuis.

Pour peu que l'on soit un minimum averti, on peut difficilement s'émerveiller d'un récit cousu de fils blancs, ne permettant qu'aux trois protagonistes importants de l'histoire d'afficher quelques zones d'ombre. On se doute bien que l'Homme va s'avérer être le vrai grand prédateur du film, et qu'une historiette d'amour va se tisser entre ce solitaire fatigué et cette mère endeuillée. De même, le conflit opposant travailleurs et militants frôle gentiment la caricature, voire sert d'accessoire tant son traitement ne débouche sur rien d'indispensable au bon déroulement du récit. Il est également regrettable de voir certains axes narratifs traités en surface, leur disparition non justifiée freinant quelque peu la portée du long-métrage. Une situation qui fait au terme patiner le rythme du film dans son entier, puisqu'à trop voir la bride lâchée sur plusieurs intrigues narratives, le spectateur finit par s'en trouver bouter.

Pourtant, une certaine maturité traverse ce deuxième long-métrage signé Daniel Nettheim. La mise en scène s'évertue par exemple à limiter l'esbroufe au strict minimum, plongeant avec une précision scientifique dans le quotidien du chasseur. Le découpage et les divers angles de caméra s'avèrent être à la fois amples et sages et la délicate photographie profite un maximum de la lumière du soleil sans chercher à épater la galerie. L'interprétation donne le change, avec un William Dafoe d'un naturel confondant qui impulse à chacun de ses regards une subtilité et une cohérence sans défaut. Il est véritablement la colonne vertébrale du projet qui donne une cohérence sans faille à l'ensemble, et qui fait de ce Chasseur un portrait psychologique souvent fascinant - doublé d'une histoire de rédemption plutôt poignante -. Et quand les dernières minutes tirent sur la corde sensible sans tact ni délicatesse, on se dit qu'il y a dans ce résultat en demi-teinte le carburant idéal pour un grand petit film. Ce qui, au regard du pitch initial, s'approche gentiment d'une agréable surprise.

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