Critique : Trois soeurs

Laure Beaudonnet | 17 juillet 2012
Laure Beaudonnet | 17 juillet 2012

Face à la mort, il n'y a pas de bonne réponse. Certains cherchent à oublier, d'autres à fuir. Parfois, on la prend à bras-le-corps pour l'affronter. Mais, la réaction juste, normée, n'existe pas. Pour son premier long-métrage, Milagros Mumenthaler décrit cette recherche de compromis. Marina, Sofia et Violeta, trois sœurs, viennent d'enterrer leur grand-mère. Elles sont désormais seules dans la maison familiale où elles ont été élevées par leur aïeule. La simplicité de l'histoire n'enlève rien au flou de la première partie du film. Aucune indication n'est donnée au public. On met d'ailleurs un certain temps avant de comprendre quel membre de la famille est décédé. Comme si on s'immisçait par hasard dans le quotidien de trois jeunes filles et, à force d'espionnage, on perçait leurs mystères.

Trois sœurs joue avec délicatesse de l'ignorance de son spectateur. Il se dégage une langueur, d'abord déroutante, ensuite agréable de cette oeuvre. Les personnages se dévoilent lentement. L'opus interagit avec le temps, l'élément fondamental dans le travail de deuil et élabore une interprétation cinématographique de la sensation de durée - le pendant subjectif du temps. Dans une monotonie narrative, la réalisatrice frôle cet espace intime, ce flottement, et dépeint les difficultés de concevoir la mort. Si naturelle soit-elle. Milagros Mumenthaler ouvre la porte fictive d'une réalité, celle de la suspension temporelle au moment de la perte d'un proche et la fait vivre à son public. Les journées s'allongent, les mouvements prennent une autre saveur. Elle s'attaque à l'altération du quotidien: un changement quasi imperceptible inscrit dans la continuité.

Si l'aspect contemplatif de Trois sœurs peu paraître désagréable au début, le film appréhende une forme de banalité avec justesse. L'instant où l'ordinaire prend des allures extraordinaires pour la sensation de vide qu'elle procure. Et dans ce marasme, la cinéaste laisse émerger les rivalités de ces sœurs. Les conflits universels des fratries et les questions qu'ils posent. Car toute relation familiale repose sur une forme d'ambivalence. Sans dérouler un récit particulièrement original, Trois sœurs touche l'indicible avec une certaine poésie. 

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