To Rome with love : Critique

Simon Riaux | 28 juin 2012
Simon Riaux | 28 juin 2012

Cela fait bien longtemps désormais que Woody Allen n'a plus livré au Septième Art l'une des partitions enjouées et férocement intelligentes dont il avait le secret, on espérait que Match Point préfigurerait un nouveau départ, las on n'aura eu droit depuis qu'à un Rêve de Cassandre sympathique et un Midnight in Paris qui déjouait les attentes sans renouer avec le brio de son auteur. Hélas, ce n'est pas To Rome with love qui viendra changer quoi que ce soit à ce constat.

 

 

Que le cinéma d'Allen touche plus le public européen qu'américain, la chose n'est pas nouvelle, et l'on peut considérer son actuelle tournée des capitales du vieux continent comme le signe d'un relatif abandon de son enracinement new yorkais, ce paradoxe qui faisait sa singularité. Occupé à filmer de luxueuses cartes postales à l'adresse d'un public déjà conquis, Woody a perdu son acuité, le pétillement qui faisait la force de cet américain, que son bagage culturel et ses névroses condamnaient à un perpétuel décalage. Ce dernier est ici constamment feint, notamment dans les scènes qui le confrontent à Judy Davis, dont chaque réplique semble extraite d'un film déjà vu et revu. Tant et si bien qu'il ne reste à l'auteur qu'à ressortir ses vieux trucs de son chapeau, à coup de non sens défraîchi, tel ce chanteur d'opéra obligé de se produire sous sa douche, jamais touchant ni iconoclaste, mais intensément ridicule.

 

 

 

La batterie de comédiens convoqués par Woody Allen ne s'en sort pas mieux. Jesse Eisenberg est condamné à singer les tics de l'auteur, tandis que son alter ego Baldwin joue les vieux sages libidineux. Les femmes s'en sortent à peine mieux, et notre fascination pour Penelope Cruz ne suffit pas à ignorer la vacuité de son personnage, il en va de même pour Ellen Page, très à l'aise en garce narcissique, mais peu aidée par un texte convenu. Quant à Benigni, il a le malheur de porter sur ses épaules l'arc allégorique de ce scénario décousu, et s'il n'a pas beaucoup de matière à défendre, son surjeu permanent laisse au spectateur un goût amer. Alors que les lumières se rallument, on se demande ce que le réalisateur a bien voulu nous raconter, à part témoigner de son amour pour l'opéra, les antipastis, les fontaines, et les petites ruelles aux teintes ocres.

 

Résumé

Pour Woody, Rome ne se décrit ni ne se raconte, c'est une mosaïque ineffable, qui combinerait chaos, légèreté, et lumière pour atteindre une paradoxale harmonie. Si la note d'intention est limpide, le résultat lui l'est tout autant : le metteur en scène ne s'est pas foulé, recycle ses vieux thèmes, et ne tente strictement rien de nouveau. Reste les décors, l'âme du lieu qui parfois transparaît, et l'indulgence mêlée de tendresse que l'on ne peut manquer d'éprouver à l'égard de l'auteur.

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