Prometheus : critique xénormorphe reborns

Simon Riaux | 28 mai 2012 - MAJ : 27/09/2023 11:58
Simon Riaux | 28 mai 2012 - MAJ : 27/09/2023 11:58

Rarement projet aura fait couler autant d'encre, suscité autant d'espoirs, soulevé autant de craintes. Prometheus, un temps intitulé Paradise, devait être un prequel d'Alien, le huitième passager, avant de devenir un film indépendant, seulement relié au xénomorphe par une « ADN commune », puis l'initiateur d'une saga autonome. On ne savait trop à quoi s'attendre, ni même s'il était bien raisonnable de placer autant d'espérances dans cette création hybride, excroissance d'une saga culte à laquelle son créateur se proposait de revenir. Comment retrouver l'inventivité, l'intelligence et la richesse d'une œuvre encore matricielle pour tout un pan du cinéma contemporain ? La réponse est multiple, mais quoi qu'il en soit, prenez une grande inspiration, détendez-vous, car Prometheus est un excellent film, même si en l'état, il semble devoir presque autant à Blade Runner qu'à Alien.

Alors que le web et la presse papier vont logiquement s'enflammer entre pros et antis, partisans du film original et défenseurs de sa nouvelle itération, il est bon de rappeler une donnée essentielle, à l'heure où la science-fiction a souffert des gribouillages numériques de John Carter ou encore de la reconvertion 3D du plus mauvais des Star Wars : Prometheus est magnifique. Jamais le film ne verse dans l'excès de réalisme à la Sunshine, ni le fantastique azimuté post-Matrix.

 

 

Photo Michael Fassbender, Noomi Rapace

 

Une performance, vu le nombre de créatures et décors fantasmagoriques qui parsèment le film. Ce dernier est d'un élégance rare, et sait jouer de son illustre parenté sans la recycler bêtement. De toute évidence, Scott s'est souvenu de ce qui fit sa gloire, et s'est efforcé de redonner à sa mise en scène quelques unes de ses lettres de noblesse. Du design extrêmement soigné, en passant par un découpage classieux et fluide, qui sait faire la part belle aux décors réels pour un impact décuplé, le film est un véritable objet d'art, dont nos yeux ne se lassent jamais.

On craignait au vu des dernières bandes-annonces et clips promotionnels que le long-métrage ne calque sa structure sur celle d'Alien, et nous gratifie d'un body count dont nous connaîtrions d'avance l'issue. Certes, les parallèles sont nombreux et évidents, toutefois, c'est dans le registre thématique que Prometheus surprend et rassure.

 

 

Photo

 

Bien plus que le sentiment de peur, c'est une réflexion qui vient prolonger celle de Blade Runner que nous découvrons ici. Car si Michael Fassbender vole rapidement la vedette à l'impeccable Noomi Rapace, ce n'est pas seulement grâce à son jeu impeccable, mais parce qu'il nous invite à prolonger le fascinant personnage de Roy Batty (Rutger Hauer), mémorable antagoniste d'Harrison Ford dans l'adaptation du roman de Philip K. Dick. Alors que Batty voulait rencontrer son créateur, le détruisait de rage en découvrant qu'il n'avait rien du Très Haut fantasmé, David l'androïde a dépassé ce stade.

Il est une machine parfaitement consciente des limites de ses créateurs, et participe à la mission Prometheus dans l'espoir de faire enfin face à une entité supérieure, à même de lui fournir des réponses que ses fabricants ne possèdent pas. Ne dit-on pas que le talent saute une génération ? Cette question pourrait-être le sous-titre du film, tant elle en est également le moteur. On pourra regretter que Scott n'explore pas à fond cette question (se réservant sans doute pour un hypothétique deuxième opus), mais elle vient éclairer l'ensemble d'un sens et d'une profondeur que nous ne pouvions déceler chez les précédents androïdes de la compagnie Weyland.

 

Si Alien était un formidable cauchemar basé sur la peur de la maternité, Prometheus se conçoit comme une horreur contraire, une angoisse de la paternité. C'est la terreur des hommes devant David, c'est l'effroi de ses fils réalisant que leurs pères Ingénieurs ne sont ni vertueux ni bien intentionnés. Plus agnostiques que religieux, Prometheus forme dès lors un diptique thématique puissant avec son ancêtre, l'un se répondant à l'autre et mettant en lumière un dialogue délicat, un momentum de cinéma inédit.

 

 

photo, Idris Elba, Charlize Theron

 

Le seul véritable reproche que l'on pourra faire à Prometheus tient à ses personnages, trop fonctionnels. En effet, à l'exception des deux brillants Rapace et Fassbender, le reste du casting se contente de rôles purement artificiels. Voilà sans doute les limites d'un script qui avait trop à faire en une durée si courte (à peine deux heures), et a jeté toutes ses forces dans une bataille sans merci avec nos à priori, fantasmes et souvenirs magnifiés. On ne nous enlèvera d'ailleurs pas de l'idée que quelques séquences essentielles ont été supprimées, entre les personnages justement, qui auraient permis à leur relations d'être tout à fait incarnées.

 

Prometheus n'est pas une suite, un reboot, ou une resucée d'Alien, il est un film autre, la promesse d'une nouvelle saga passionnante, et semble-t-il riche d'un bestiaire non moins terrifiant. Les signes de cette incontestable réussite ? Des nouvelles questions sans réponses, des interrogations qui nous enflamment déjà l'esprit et une qualité essentiellement cinématographique, celle de clore le métrage sur son image la plus belle et excitante.

 

 

Affiche officielle

 

Résumé

Dérangeant, perturbant et inattendu, Prometheus relit les angoisses d'Alien et les connecte à la symbolique de Blade Runner. Le résultat est aussi déroutant que fort.

Autre avis Geoffrey Crété
C'est beau, mais c'est bête à un niveau stratosphérique, que ce soit dans l'intrigue tenue par des personnages creux, ou dans l'histoire avec un angle grotesque et grossier sur la mythologie. Et chaque revisionnage est un peu plus douloureux.
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Lecteurs

(3.2)

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commentaires

01/11/2020 à 21:02

Je n'avais jamais été autant déçu par un film et je ne pensais pas qu'on puisse faire plus mauvais... Jusqu'à ce que la suite sorte. A ce niveau de ratage c'est un cas d'école.

Flo
21/02/2020 à 13:42

...parasiter (comme un alien) avec plus de pistes de réflexion.
Et voir ensuite si ça se propage.
:-)

Shadow the Hedgehog
20/02/2020 à 15:30

Hey Flo ! Puisque t'es là, tu peux nous expliquer pourquoi tu fais ça ? Quels sont tes motifs ?

Flo
20/02/2020 à 15:23

D’abord en ce qui concerne la saga "Alien", Ridley Scott l’avait déjà dit plusieurs fois, il s’agit d’une série B (comme le "The Thing" original) réalisée avec des moyens de série A. Et chaque films-faits par des réalisateurs « techniques » venus de la pub, du clip ou des effets spéciaux-reposent sur la même structure de huit clos avec ennemis invisibles (transposable aussi dans une maison hantée ou un « piège de cristal »). Mais chacun ayant ses propres style et « couleur dominante » particuliers:
- Horreur/Brun pour "Alien";
- Guerre/Bleu pour "Aliens le Retour";
- Polar/Orange pour "Alien 3";
- Super Héros Pirates (Whedon au scénar!)/Vert pour "Alien la Résurrection".

Ici pour "Prometheus", cousin des 4 autres, le style s’apparente dès le départ à l’exploration de l’inconnu-à dominante mauve-se qui justifie son design et son superbe thème musicale à la fois ample et légèrement naïf. Il y a même un peu de "Star Trek" dans la première partie/heure de cette histoire.
Evidemment quand au bout d’un moment on se retrouve avec des décors « techno lovecraftiens » de Giger et que les choses vont fatalement partir en couille, là on retrouve la dimension B de la saga, avec monstruosités gluantes qui buttent les persos uns par uns-et l’accouchement le plus jouissif et grotesque qu’on ait vu au cinéma. Ce qui est un retournement terrible de ce que Ridley Scott nous présentait au départ, à savoir que la découverte de l’inconnu peut être une chose aussi horrible que belle. On nous tire le tapis sous le pied et l’enthousiasme du départ véhiculé pas les scientifiques en chef devient angoisse. Et ça c’est la bonne nouvelle de "Prometheus": comment fiche les pépettes avec une histoire dont on connait la fin et des bestioles vus tant de fois dans différents supports visuels ? En racontant l’histoire de la fin de l’humanité à travers la folie destructrice de « dieux » qui nous aurait peut-être créé et se seraient détourné de nous.
Une Apocalypse qui était destinée à arriver un jour part la faute de la curiosité et de l’avidité de l’homme-rappelons qu’en 2012 il n’y a que peu de films qui vont traiter directement de la probable fin du monde (il y avait un peu aussi l’invasion à la fin d’"Avengers") ou de la fin d’Un Monde ("The Dark Knight Rises").

Maintenant là où Ridley Scott a peiné à capter l’audience c’est certainement au niveau de la caractérisation des personnages, en majorité tous des archétypes presque caricaturaux (celui qui se plaint, le faiblard, les 2 copains qui font des paris). Et c’est justement le pire point faible du film car, pour exemple, Tous les "Alien" comportaient des personnages extrêmement caractérisés-convoyeurs routiers, marines, taulards ou pirates-attachants et donc suffisamment cools pour qu’on ne sache pas qui va y passer en premier parmi nos chouchous.
On avait surtout envie qu’ils survivent, même si c’était peu crédible et ici ce serait plutôt « faite le ménage, on veut surtout voir Magnéto, Lisbeth Salender et Heïmdall »-l’humain en devenir, la new guerrière et le sage. Même le personnage de Charlize Theron déçoit en était présentée comme la plus cynique et « robotique » de tous et donc paradoxalement celle qui le plus de chance de mener l’histoire à son terme (peut-être un changement dans le scénario). Ce détachement envers ses acteurs au profit de l’atmosphère est trop souvent systématique dans les films récents de Scott, qui préfère les laisser s’exprimer seuls dans le contexte, alors que son cinéma parle beaucoup de la déchéance de l’homme au profit de femmes fortes.
Alors oui, "Prometheus" est un film visuellement superbe dont la majorité des images imprègnent la rétine, un film d’ambiance surtout, mais il faut préciser que Ridley Scott et Damon Lindeloff n’ont jamais menti sur leurs intentions. Scott a toujours dit ces intentions en ce qui concerne l’histoire autour du Space Jockey, et on les y retrouvent effectivement. « Même ADN que "Alien" », on le voit dès le début, mais des mystères subsistent qui appellent de toute les forces une suite (qui va aller sur LV 426 ?) même si une partie de la conclusion semble annuler les franchises "Alien vs Predator" - dommage pour le 1er, plutôt cool, mais tant mieux pour le 2ème.
À moins d’un paradoxe temporel qui expliquerait de manière plus crédible le lien Space Jockeys/humains et remettrait Dieu ou le Destin au centre de la vie.
Pourquoi pas ?

Man
30/12/2019 à 15:20

Les ingénieurs dans Prométheus
David, l'IA dans Covenant.
LA VIE qui n'est pas synonyme de LE BIEN dans la suite ?

Les idées étaient là. L'image y est, superbe. Le traitement est catastrophique.

karasuu
15/02/2016 à 14:15

De grands mots et des métaphores grandiloquentes, mais si peu de réels arguments pour une critique creuse. Certes le film est beau, techniquement Scott sait faire de belles images. Mais le script, les personnages.... rien ne fait sens !
On part explorer le secret de nos origines sans psy, histoire de gérer le trauma que pourrait provoquer la rencontre de nos créateurs. Des personnages qui pour une si grande mission, ne font connaissance qu' une fois partis....
Même si le film aborde des questions vraiment intéressantes sur la vie, ses origines et notre évolution, Prometheus se vautre lamentblement pour ce qui est de les emmener habilement via les personnages et son histoire.
Votre critique utilise tout autant d'artifices stylistiques pour detourner du réel problème : le manque de substance...

john
21/10/2015 à 11:49

fnhnhgn

Zsosgrgp
31/12/2014 à 13:16

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Dbextwbu
31/12/2014 à 13:16

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Tfcxkhhh
31/12/2014 à 13:16

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