Les Infidèles : Critique

Louisa Amara | 27 février 2012
Louisa Amara | 27 février 2012

« Cet exercice me permet de proposer autre chose, de ne pas devenir "The Artist". Je ne veux pas me laisser enfermer dans une image figée. Je veux toujours surprendre, quitte à me brûler les ailes. Ce n'est pas un calcul de ma part, c'est ma nature. Contrairement à ce que certains croient, personne ne nous attend nulle part. Alors le simple fait que ce film [Les Infidèles] existe me rend déjà » heureux. » Ces quelques mots de Jean Dujardin exprime parfaitement l'état d'esprit plein d'humilité et de serrenité qui l'habitait alors, et encore aujourd'hui.

Jean Dujardin et Gilles Lellouche se sont donc lancés à corps perdus (au sens propre et figuré) dans une aventure hors norme : un film à sketchs. Forme cinématographique ô combien casse-gueule, elle suppose une variété intéressante qui vire parfois au déséquilibre complet. Comment réussir à fédérer 7 réalisateurs totalement différents autour d'un même sujet en restant cohérent de bout en bout ? C'est là le rôle de l'écriture. Jean et Gilles se sont entourés d'auteurs reconnus, Nicolas Bedos, qu'on ne présente plus, Stéphane Joly et Philippe Caveriviere pour écrire chaque segment, en ciseler les dialogues et respecter un fil conducteur clair.

 

 

C'est ensuite seulement qu'ils ont choisi les réalisateurs, Fred Cavayé (réalisateur d'A bout portant) pour le prologue au rythme effréné, Emmanuelle Bercot, (co-scénariste/dialogues de Polisse) pour La Question, le segment le plus émouvant et réussi. Eric Lartigau est choisi pour Lolita, un sketch indispensable sur l'infidélité la plus typique et pathétique chez ces messieurs, le fameux coup de cœur/bite pour une jeune écervelée. Un grand moment de réalisme et de ridicule, auquel Gilles Lellouche prête volontiers son image. Michel Hazanavicius s'amuse à enlaidir et beaufiser Jean Dujardin dans  une histoire glauque de séminaire en province. Les pastilles comiques à hurler de rire vous feront découvrir l'immense talent d'Alexandre Courtès, un réalisateur à suivre. Jean et Gilles se reservent l'épilogue à Las Vegas où ils iront jusqu'au bout, vraiment jusqu'au bout.

 

 

Verdict : non seulement ça se tient, mais le film développe une réflexion sur l'infidélité, le couple, l'amour, les amis, les emmerdes, extrêmement profonde, sous des dehors frivoles. On pense parfois à Jean Rochefort et ses petites fourberies dans Un éléphant, ça trompe énormément. Les Infidèles sera notre film générationnel, celui qui réussit à décrire une époque, des comportements, sans juger ses héros parfois au comble de la veulerie. A la fois comédie, film d'amour, drame, le film exploite toutes les formes et tous les tons, sans jamais se perdre. Tous les segments se complètent au final pour former un puzzle cohérent, le tableau de l'homme du 21e siècle aux prises avec ses pulsions, ses doutes.

 

 

Bien sûr, certains segments sont plus intéressants que d'autres, et chacun y trouvera son préféré. Ainsi le sketch du séminaire (du fraîchement oscarisé Michel Hazanavicius) est sans doute le moins rythmé mais il était important de montrer jusqu'où un homme peut aller dans la bassesse quand il veut baiser. La démonstration est en cela parfaitement réussie. Et les femmes dans tout ça ? Elles ne sont pas en reste, bien plus qu'un simple objet de désir, elles sont aussi les épouses, les maîtresses cruelles, celles qui les poussent dans leurs derniers retranchements, et qui elles aussi, ont des failles. On saluera la performance d'Alexandra Lamy, remarquable, sans oublier l'inénarrable Géraldine Nakache. Manu Payet, phénoménal, confirme tout le bien qu'on pense de lui. Quant à nos deux héros, ils prouvent qu'ils n'ont peur de rien, surtout pas d'écorner leur image. Dieu que c'est jouissif ! Faites comme eux, faites vous plaisir !

 

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