Critique : Les Chants de Mandrin

Laure Beaudonnet | 19 janvier 2012
Laure Beaudonnet | 19 janvier 2012
Les Chants de Mandrin n'a pas besoin de se soumettre aux règles classiques de la narration pour être captivant. Assez paradoxalement, l'usage du concret ne le rend pas moins onirique. Au contraire. S'il s'inspire de faits réels : les disciples du célèbre bandit  Louis Mandrin se lancent dans une nouvelle campagne de contrebande ; il agit en même temps comme une image évanescente. Adoptant la forme d'un rêve éveillé, il progresse sur deux échelles de réalités : celle du fantasme et celle du concret. Tout en s'attaquant à la problématique de la contrebande, l'œuvre manifeste, par sa forme,le lyrisme de son sujet. Témoigner de la parole du maître, l'honorer d'une publication et poursuivre son projet, tels sont les objectifs des protagonistes, accompagnés de concepts bruts.

"Notre intention est de créer une nouvelle fois un espace séparé, une utopie poétique où l'art déploie sa pleine puissance de figuration et de pensée." Et le défi est relevé par Rabah Ameur-Zaïmeche car Les Chants de Mandrin est une œuvre formelle dont la puissance esthétique fait honneur au sens. Les cadres sont étudiés de manière quasi-géométrique. Certaines contre-plongées fascinent, celles de l'escalade des contrebandiers sur le fort en particulier. La structure de l'image est précise, efficace. Les plans dévoilent des reliefs trop rares au cinéma. On est dans le travail d'orfèvre qui privilégie la contruction. L'œuvre s'approprie le geste plastique en mettant les jeux de lumière au centre de son attention, irradiant l'espace. Les contre-jours à cheval sont spectaculaires. On palpe l'expérience du beau, celle qu'on ne discute pas. Cet instant d'intimité avec l'œuvre, au-delà du discours argumenté qui annihilerait toute profondeur.

Trêve d'analyse. Les Chants de Mandrin a tout d'une œuvre qui passera inaperçue. Plus conceptuelle que narrative, elle pâtit de son hermétisme. La compréhension du public est diluée dans cet emboîtement d'instants de vie. Soit il se fait porter par l'expérience. Soit il reste indifférent à l'envoûtement. Triste sort pour une tentative excellente qui joue à merveille de la somnolence de son public.

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