Critique : Des vents contraires

Nicolas Thys | 12 décembre 2011
Nicolas Thys | 12 décembre 2011
Inutile de tergiverser, malgré un casting parfait, le film de Jalil Lespert est loin d'être une réussite, accumulant des séquences longues ou redondantes, qui auraient méritées d'être coupées, des moments faussement larmoyants et une mise en scène parfois un peu lente. Car une énième composition sur la vie d'une famille brisée pourquoi pas, mais trop c'est trop, d'autant plus que dans le jeu de décomposition latente des personnage, cette vie finit par sembler banale voire ennuyante. Pourtant si on fait abstraction de tous ces éléments, Des vents contraires reste une oeuvre intéressante à plus d'un titre, notamment dans son rapport très contemporain à la thématique qu'il évoque, celle de la disparition.

Adaptation d'un roman d'Olivier Adam sorti en 2009, cette histoire d'un père seul avec deux enfants se distingue par son prologue et sa star qui disparaît dans la nature. Audrey Tautou à peine apparue, voilà qu'elle nous quitte. Sur un coup de tête et une dispute. Comment, alors que notre société met en permanence ceux qui y vivent sous surveillance, une telle fuite est-elle encore possible ? Ce corps qui s'est dématérialisé, on ne peut le concevoir que comme une mort mais un doute subsiste. Et cette disparition hante le film comme l'impossibilité pour l'homme et ses deux enfants de se reconstruire en tant qu'individus entiers.

Tous vivent d'un manque, morcelés, car la disparition n'est jamais une mort, elle est d'abord la possibilité d'un retour. Un espoir qui perdure, qui plombe et empêche d'avancer. La mise en scène, composée de plans souvent fixes, qui épouse, par sa distance avec les acteurs et l'immensité d'une nature morne à défaut d'être morte, le point de vue de la disparue encore sur Terre sans trop l'être, ne fait que revenir sur cette idée. De même ces séquences oniriques, si réalistes, tournées en plan rapproché et qui disparaissent dans un plan d'ensemble qui rappelle que le vide est partout.

C'est cette tragédie que Lespert cherche à nous faire comprendre. Parfois de manière intelligente, comme au détour de certaines coupes brutales ou de faux raccords adroits, de la fenêtre d'une voiture à celle d'un restaurant, marques profondes d'une dichotomie entre l'esprit perturbé du protagoniste toujours ailleurs et son corps encore vivant et pensant. Parfois avec moins de subtilité comme dans les relations de Magimel avec des personnages nombreux, tous en crise, tous perdus, incapables d'affronter le monde, reprenant sans cesse le même leitmotiv de la disparition avec quelques variations sur la fuite et qui finissent à force par lasser.

Malgré ses défauts, le film laisse envisager le meilleur pour la suite de la carrière comme réalisateur de Jalil Lespert qui en est ici à son deuxième film. Et il ne fait aucun doute que ces Vents contraires plairont aussi à ceux qui veulent contempler de magnifiques paysages maritimes sans pouvoir se déplacer !

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