Critique : Juste entre nous

Paul Béranger | 9 mai 2011
Paul Béranger | 9 mai 2011

Comme un certain Buñuel, Rajko Grlic dresse unportrait cynique de la bourgeoisie. En brouillant les codes socio-culturels dela société, il nous livre une œuvre anticonformiste. À travers les aventures tragi-comiquesde quatre destins entrecroisés, le cinéaste croate conte, avec un langagepolitiquement incorrect, les efforts fournis par deux frères, leurs femmes etleurs maîtresses pour assouvir leurs besoins respectifs, à travers le sexe etle fric.

À l'image du père défunt, les deux frères suivent leurinstinct sexuel et accumulent les relations amoureuses. Les personnages se réfugientavec ivresse dans l'adultère en cherchant une sortie de secours, un bol d'oxygène.Ils fuient leurs démons tels un Don Quichotte, dont le réalisateur sous-entendle parallèle à maintes reprises. Mais, au-delà de l'infidélité conjugale, lefilm constitue un véritable hymne à la vie : ça commence par la mort d'unêtre et ça se termine par la naissance d'un autre, la boucle est bouclée. Un hymneà la vie donc, mais un manifeste de la révolte aussi. Rajko Grlic l'explique mieux que quiconque « ilsemble que nous ne pouvons seulement choisir la personne avec qui on partage notrelit » Si on est esclave de la société, on reste en revanche maître de nosplumards.

Les acteurs sont excellents dans leurs interprétations même si MikiManojlovic, acteur fétiche de Kusturica, planeau-dessus du lot en incarnant remarquablement bien le bourgeois désarçonné,victime de ses passions. Le ton du film est une subtile combinaison de drame et d'humour. Le choix du cadre et de la lumière est aussi très réussi et correspond à cette tonalité, la lumière est douce et les couleurs fades. On a l'impression que chaque mouvement de la caméra, chaque angle est méticuleusement calculé. Il n'y a pas de gâchis dans la mise en scène de Grlic. On le sent maître de son sujet.  Malgré un scénario soigné jusqu'aux moindres détails, on peut, toutefois, reprocher au film un manque de dynamisme dans la narration et de dialogues percutants. 

Rajko Grlic signe donc une oeuvre pronfondement réaliste qui offre une sorte d'antithèse à son On aime qu'une seule fois, film qui l'a révélé au grand public.

Résumé

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