Critique : We are four lions

La Rédaction | 7 décembre 2010
La Rédaction | 7 décembre 2010

Revenons un peu en arrière. Au début des années 2000, Chris Morris se fait détester de toute l'Angleterre grâce à une série appelée Jam. Adaptée de son émission radiophonique Blue Jam, cette série n'a pas fait long feu avant de devenir culte. Le concept ? Sûrement le plus irrevérencieux et amoral jamais imaginé. Six épisodes filmés comme du David Lynch, à la musique souvent calme et anxiogène, qui abordent avec un immense détachement des sujets comme la nécrophile, le viol, la pédophilie, l'abus sexuel de personnes handicapées et j'en passe sûrement des meilleurs. Sans hésiter, l'un des moments les plus politiquement incorrects et drôles, si tant est que l'on partage cet humour relativement bizarre. Le but ? Mettre à mal les clichés journalistiques sur ces sujets et faire sauter les tabous et les valeurs sans jamais tomber dans le facile scabreux.

En ayant pris connaissance du personnage qu'est le réalisateur Chris Morris, il est possible de comprendre la démarche de Four Lions. Ce qu'il a toujours fait sur le petit écran, il le développe ici sur le grand. Bien sûr, l'image est moins bien léchée mais le côté docu-fiction-caméra-à-l'épaule colle terriblement bien au sujet. Bien sûr, c'est beaucoup moins corrosif que Brass Eye ou Jam, mais ce n'est pas une tare que de vouloir légèrement s'assagir pour peut-être toucher plus de monde.

Dans Four Lions, Chris Morris tient cette fois-ci à faire sauter le tabou du terrorisme islamiste et de la peur que celui-ci engendre. Car pour le réalisateur, il est clair qu'avoir peur, c'est donner du pouvoir au sujet de notre effroi. Il choisit donc de tout casser par le burlesque, la farce et la crétinerie. Ainsi met-il en scène 5 pseudo-jihadistes très énervés par le traitement réservé au musulmans en Angleterre et qui décident de se venger en tuant un max de Rosbeefs et encore on n'est pas bien sûr que ce soit leur réelle motivation. On assiste donc à tous les préparatifs, à l'entrainement de certains au Pakistan, à la confection des bombes dans la cuisine, etc. Mais à cause de leurs discours contradictoires et de l'ambiance très "Club des 5", une question nous vient à l'esprit : "Mais qu'est-ce qu'ils foutent?".

Et elle est là, la grande force du film : le rire. De situations grotesques en situations à la con, de part leur façon incroyable d'agir en dépit du bon sens, ces soit-disant terroristes nous paraissent tout simplement très humains. Tellement, que l'on s'attachent à eux. Car eux non plus ne sont pas des clichés. Non, tous les terroristes ne sont pas des fans de la charia. Oui, ils ont une famille qu'ils aiment et une vie sociale. Loin des stéréotypes évidents, loin du manichéisme, Chris Morris réalise une tragi-comédie efficace qui explose l'intégrisme et la peur qu'il induit en lui, donnant un visage humain et en nous permettant de s'en moquer.

Perrine Quennesson

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