Critique : Le Caméléon

Pierre-Loup Docteur | 3 juin 2010
Pierre-Loup Docteur | 3 juin 2010

Tout comme Patrice Miller dans A l'origine de Xavier Giannoli, Frédéric Fortin est un usurpateur d'identité : en 2000, il se fit passer pour Nicholas, un adolescent américain disparu quatre ans auparavant. Jean-Paul Salomé s'empare de ce fait divers pour dresser le portrait d'un être complexe, un grand malade inoffensif qui partage avec le personnage du film de Giannoli le même besoin d'amour et de reconnaissance. Le réalisateur n'évite pas tous les clichés du film labellisé « histoire vraie » (d'inutiles cartons en guise de conclusion...) mais signe néanmoins un film intéressant porté par Marc-André Grondin, parfait dans le rôle titre. L'acteur rend son personnage parfois inquiétant et laisse transparaître sa fragilité avec beaucoup de subtilité.

La première séquence, très réussie, le retient face à un miroir brisé renvoyant plusieurs images de lui. Fortin se rase, se fait tatouer, opère toutes les transformations physiques nécessaires afin de se faire passer pour un autre. D'emblée, Salomé ne laisse aucune place au doute en présentant son personnage comme un imposteur. Son choix est judicieux puisqu'il évacue ainsi toute ambiguïté le concernant, et peut alors élargir le propos de ce son film. Déroulant son intrigue en Louisiane, le réalisateur se plaît à ponctuer son film de plans d'illustration. Bien que cette volonté de tirer parti de son décor soit tout à fait louable, les scènes contemplatives sont maladroites et bien trop pauvres pour apporter au film une ambiance particulière.

Jean-Paul Salomé est cependant plus inspiré lorsqu'il choisit de prêter une grande attention à ses seconds rôles, trois femmes, une agent du FBI, la sœur et la mère de Nicholas, respectivement interprétées par les très convaincantes Fanke Janssen, Emilie De Ravin, Ellen Barkin. Grâce à elles, il double son film de la description, juste et touchante, d'une famille détruite qui préfère croire un mensonge pour panser illusoirement ses plaies. Le Caméléon piétine malheureusement sur la fin : en privilégiant l'enquête policière, il perd de son intérêt et finit par souffrir de quelques longueurs. Pourtant, malgré quelques réserves, le film réussit à convaincre grâce à son scénario bien mené et à ses acteurs remarquablement dirigés.

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