Critique : Thelma, Louise et Chantal

Thomas Messias | 2 mars 2010
Thomas Messias | 2 mars 2010

Il faut bien l'avouer : avec son titre en forme de blague franchouillarde, Thelma, Louise et Chantal n'est pas a priori le film le plus excitant de l'année, surtout si l'on ajoute qu'il est l'oeuvre de Benoît Pétré, ancien de la troupe des Quiches qui nous offrit en son temps un Foon pire que merdique. La surprise est d'autant plus belle : voici une comédie génialement amère sur trois femmes ayant atteint des âges qui imposent de commencer à faire le bilan. Chantal, Gabrielle et Nelly sont trois fleurs plus ou moins fanées que seul leur hargne permanente parvient à tirer d'une torpeur forcément plombante. On se moque un peu de cette histoire de mariage de l'homme qu'elles ont toutes aimé ; il n'est que prétexte à un road movie franchement corsé et absolument impitoyable.


Le film de Pétré surprend d'abord par la vigueur de sa mise en scène, qui se matérialise dès l'inventif (et rigolo) générique de départ et ne cesse de se confirmer à mesure que le récit se déroule et que les masques tombent. Grands angles, transitions musicales réussies, idées stimulantes tout du long : l'air de rien, le film n'a pas à rougir de son statut de road movie tant le parcours semble à la fois extrêmement fluide et transporté par un girl power - cougar power ? - décapant. À cette imagerie s'ajoute la surprenante frontalité avec laquelle Pétré s'empare de ses personnages : les corps sont dénudés et les cicatrices apparentes, traduisant de façon plus qu'émouvante la décomposition progressive de ces héroïnes déchues mais pas abattues, conscientes d'être sur la pente descendante mais assumant cela avec ardeur.


On ne tient pas là la comédie la plus drôle de l'année mais peut-être la plus vivifiante et rentre-dedans, maniant un humour acéré qui ne fait pas toujours mouche mais présente une totale cohérence avec le reste du film : rire pour ne pas pleurer, baiser pour se prouver qu'on vit, boire pour oublier qui on est. Même des scènes potentiellement tagada tsouin tsouin comme le fameux mariage de l'ex parviennent à être détournées d'un droit chemin trop souvent emprunté par le cinéma français. Qu'on les aime ou qu'on les déteste, qu'on les trouve désirables ou repoussantes, ces femmes-là sont les tigresses du si étonnant moteur qu'est Thelma, Louise et Chantal, premier film si persuasif qu'on en arrive même à trouver à son titre une certaine pertinence.

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