Critique : Un conte finlandais

Thomas Messias | 28 décembre 2009
Thomas Messias | 28 décembre 2009

Combien connaît-on de réalisateurs finlandais actuels ? En creusant un peu, on trouve Antti-Jussi Annila, auteur d'un Sauna qui ravit les festivals mais n'a pas atteint les salles françaises. À part ça, il y a les Kaurismäki. Oui, les Kaurismäki : car derrière Aki, cinéaste taciturne prisé pour son humour à froid, se cache Mika, son frère aîné, moins connu mais très actif depuis une bonne vingtaine d'années. Après quelques documentaires musicaux, le voici de retour aux commandes d'une fiction, le très mal nommé Un conte finlandais. Soit l'histoire de trois quinquas qui picolent et tentent de refaire le monde pour oublier que leurs vies ne ressemblent pas à ce dont ils rêvaient. Alcool et désillusions : tout ce qu'on attend d'un film finlandais. Heureusement, car c'est à peu près tout.


Après avoir sommairement présenté les trois anti-héros et leurs atermoiements, Kaurismäki les plante dans un bar-karaoké désert - veille de Noël oblige - qui sera le théâtre de leurs confessions et de leurs règlements de compte. Le premier quart d'heure passé, on se retrouve donc dans un huis clos au décor pathétique, digne d'une cafeteria d'autoroute. Premier acte : honteux de leurs conditions respectives, les trois amis boivent des coups et parlent de la pluie et du beau temps, sans aborder les sujets qui fâchent. Deuxième acte : ils se jurent de se raconter la vérité, rien que la vérité, toute la vérité... mais l'irruption d'une belle inconnue risque de bouleverser leurs plans. C'est tout le principe du film : montrer que les aléas de l'existence nous contraignent généralement à repousser l'instant fatidique où il faudra enfin être sincère et se livrer sans fard... La démonstration est concluante, mais fait d'Un conte finlandais un film frustrant et un peu vide, les protagonistes passant leur temps à se tourner autour sans jamais vraiment se rentrer dans le lard.


On aurait pu espérer que l'alcool pousse enfin les trois hommes à se cracher leurs rancœurs au visage, à exprimer leur détresse et à tenter d'aller plus loin. Mais le finlandais a visiblement le foie trop entraîné pour qu'un déferlement de verres bien remplis suffise à briser la glace et à faire fondre la pudeur ambiante. On n'ira donc pas au-delà des quelques révélations d'usage, les personnages finissant par se dire ce qu'ils ont à se dire sans que cela ait une quelconque conséquence. L'impression d'ensemble n'est pas désagréable, mais Kaurismäki ne parvient pas vraiment à nous emmener là où il le voudrait, dans cet univers alcoolisé permettant aux langues de se délier et aux problèmes de se régler au moins en apparence. La mise en scène assez rudimentaire peine à donner la moindre grâce à cette histoire assez sommaire. Symbole de ce sympathique gâchis : cette femme belle et mystérieuse qui apparaît en milieu de film dans un mouvement quasi surnaturel ne garde son aura qu'un temps, et finit par être réduite à une simple symbolique sexuelle. Contrairement à son petit frère, qui fait toujours la même chose mais le fait bien, Mika Kaurismäki manque décidément de style pour offrir plus que de petites œuvres inconséquentes.

Résumé

Newsletter Ecranlarge
Recevez chaque jour les news, critiques et dossiers essentiels d'Écran Large.

Lecteurs

(0.0)

Votre note ?

commentaires
Aucun commentaire.
votre commentaire