Critique : La Famille Wolberg

Thomas Messias | 1 décembre 2009
Thomas Messias | 1 décembre 2009

Par la force des choses, La famille Wolberg a été cité plus que de raison ces dernières semaines : il restera en effet le dernier film tourné par Jocelyn Quivrin, qui campe ici un second rôle d'une importance capitale. Il est en effet l'homme qui fait douter Marianne Wolberg, mère de famille jusque là exemplaire, mais partie voir ailleurs et hésitant à y rester. Ou comment faire partir en lambeaux un cadre familial apparemment idéal, où les parents sont aimants et où les enfants sont aussi singuliers que possible. Pour son premier long, Axelle Ropert livre une oeuvre assez insaisissable, aux allures de comédie indépendante américaine avec sa famille juive plus barrée qu'il n'y paraît. Sauf que transpire de cet univers un mal-être bien réel, un inconfort incontestable, qui montre que la famille parfaite n'existe pas.


Le père a beau être l'irréprochable maire de la petite ville où vivent les Wolberg, les enfants ont beau constituer la descendance idéale, les choses finissent tout de même par tourner court. Parce que l'emprise bienveillante que Simon Wolberg tente d'avoir sur sa famille crée une sensation d'étouffement qui ne donne envie que de fuir. Mais si La famille Wolberg, malgré des thèmes souvent traités, possède un certain goût de jamais vu, c'est parce que Ropert livre un traitement toujours décalé, toujours volontairement à côté de ses pompes, de ce sujet qu'on connaît trop bien. Une blague antisémite pour désamorcer le côté juif ; des dialogues refusant parfois le réalisme, ou s'enfonçant parfois dans le consensuel pour mieux faire ressortir la cruauté de ce qui suit ; des personnages secondaires perturbants, qui montrent que la vie n'est jamais ce qu'on en attend... C'est un film qui, en jouant avec les conventions, ne cesse de les fuir.


Si ce que tente Axelle Ropert fonctionne la plupart du temps, c'est principalement grâce à un casting aussi impeccable que bien dirigé, qui accentue la bizarrerie et la beauté de cet ensemble si fragile. François Damiens est un acteur dramatique totalement inattendu - même si sa prestation dans le dernier Doillon le laissait présager -, laissant apparaître des failles prodigieusement bouleversantes. Serge Bozon est une mauvaise conscience barbue et amusante, l'incongrue caution philosophique du film. Valérie Benguigui est impeccable, les enfants sont d'une justesse absolue. Quant à Jocelyn Quivrin, à la fois nonchalant et parfaitement conscient de ce qui se trame, il livre un adieu assez déchirant, notamment à travers une scène fantastique avec François Damiens, où les deux hommes hésitent entre se mettre des pains, se raconter leurs tourments ou se prendre dans leurs bras. C'est là qu'est la beauté de cette Famille Wolberg mineure mais décalée, qui prend régulièrement le contrepied du spectateur et le fait d'autant plus réfléchir.

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