Critique : Ultimatum
Réputé pour quelques téléfilms apparemment brillants diffusés sur Canal+, Alain Tasma débute sur grand écran dans la même veine, s'intéressant à une poignée de personnages sur fond de grands évènements de politique internationale. Ultimatum commence le 31 décembre 1990, quelques jours avant que la coalition occidentale ne se mette à bombarder l'Irak. En Israël, forcément, la peur monte, la moitié des armes chimiques irakiennes étant dirigées vers le pays. Le film montre comment quelques habitants de Jerusalem - notamment un couple formé d'un français et d'une franco-italienne - tentent de vivre malgré cette menace, de se protéger sans rester prostrés, et de rassurer les proches morts de peur. Malgré le titre en forme de menace guerrière, jamais la guerre ou l'action ne prendront le pas sur l'étude sociologique de ces quelques protagonistes.
La réussite d'Ultimatum
semble réellement dépendre de la qualité de son interprétation. Dans le
rôle des parents tétanisés par l'inquiétude, Anna Galiena et Michel
Boujenah sont assez effroyables, et gâchent tous les passages pourtant
intéressants sur la peur qui grandit avec la distance et l'ignorance.
Même chose en ce qui concerne le couple vedette : Jasmine Trinca a beau
être totalement convaincante et donc extrêmement touchante, elle ne
peut rien pour la prestation catastrophique de son partenaire. Gaspard
Ulliel a fait autant de muscu qu'Olivier Minne mais ne s'est
visiblement pas préoccupé de muscler son jeu, qui semble se dégrader de
film en film. Son personnage de type en colère est certes le plus mal
taillé de tous, mais l'acteur en fait un sommet de platitude qui rompt
du coup la crédibilité de la crise conjugale vécue par les deux héros.
Dommage
: le reste du film, bien que manquant parfois d'intensité, est d'assez
bonne facture et méritait d'être mieux défendu que cela. Ultimatum
a même tendance à devenir de plus en plus intéressant à mesure que la
menace irakienne se fait plus précise, quand vient le moment de se
calfeutrer et de porter des masques. Là, la paranoïa et la
claustrophobie se font ressentir, notamment chez la jeune maman qui
supporte mal de voir son nouveau-né hors de portée, protégé par un
caisson en plastique. Sans explosion, sans acte de violence, Alain
Tasma monte efficacement l'impact psychique de la menace, qu'elle soit
portée ou non à exécution, et les différentes réactions que cela
engendre. C'est le principal intérêt d'un film pas si politique que ça,
qui dit finalement assez peu de choses sur Israël mais préfère pointer
du doigt l'universalité de certains sentiments humains comme l'angoisse
et l'inconscience.
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