Critique : Jaffa

Thomas Messias | 3 juillet 2009
Thomas Messias | 3 juillet 2009

En 2004, Keren Yedaya nous offrait Mon trésor, petite merveille avec déjà Ronit Elkabetz et Dana Ivgy dans le rôle d'une mère et sa fille. Autant dire que les nombreux spectateurs bouleversés par ce petit miracle attendaient comme une bénédiction le nouveau film de la réalisatrice, qui ne retrouve malheureusement jamais la grâce de son premier long. Jaffa est pétri d'imperfections et de ficelles un peu voyantes qui l'empêchent de prendre son envol. Premier écueil : la construction. Sous couvert de description de la mésentente entre israéliens et palestiniens, Yedaya met une cinquantaine de minutes à installer son sujet, à situer les personnages les uns par rapport aux autres. Et tout ça pour quoi ? Pour aboutir au trauma de milieu de film, celui qui mènera à la partie la plus intéressante du film. Sans trop en raconter, cette seconde moitié parle de transmission, de non-dits, de culpabilité, avec la possibilité pour la cinéaste de filmer des face-à-faces moralement éprouvants.


Mais voilà : d'un bout à l'autre, le film se contente de rester à la surface des choses, racontant les évènements sans jamais s'y impliquer, comme on relaterait des faits divers. Et les rares moments d'émotion semblent bien maladroits, jamais dans le tempo, avec trop de pleurnicheries ou pas assez. On se désintéresse progressivement de cette histoire dépourvue de chair et de passion qui pâtit en outre de la faiblesse de l'interprétation des jeunes comédiens. Les deux amants maudits de l'affiche sont en effet d'une rare transparence, et c'est bien gênant lorsqu'il s'agit d'insuffler un élan tragique à un film.


Tout n'est pas mauvais pour autant dans ce petit drame certes assez prévisible : Ronit Elkabetz est une nouvelle fois magnifique en mère courage qui voit malheureusement sa famille lui échapper. Et Keren Yedaya excelle à donner du corps à cette ville de Jaffa, théâtre fermé de ce drame façon Roméo et Juliette décentralisé en Israël. Enfin, même si les choix effectués par l'héroïne sont assez discutables, c'est parce que le scénario n'hésite pas à prendre parti, à faire des choix bien marqués au lieu de jouer la tiédeur et le consensus. Insuffisant cependant pour rendre l'ensemble réellement convaincant, ce qui ne doit pas empêcher de continuer à suivre cette jeune réalisatrice capable de faire des merveilles.

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