Critique : Accords et désaccords

Thomas Messias | 1 juillet 2009
Thomas Messias | 1 juillet 2009

Si la carrière de Woody Allen a longtemps été une jolie routine au rythme métronomique d'un film par an, il n'a pas attendu ces dernières années pour surprendre. Un bon exemple est ce curieux Accords et désaccords qui rompt un temps avec l'introspection psychanalytique pour s'accorder un vibrant hommage aux musiciens qui ont toujours accompagné Allen dans sa vie comme dans ses films. Lui-même (mauvais) clarinettiste, le réalisateur a toujours admiré ces types capables d'enchaîner des cascades de notes avec leurs dix petits doigts. D'un bout à l'autre, et même si le héros n'est pas foncièrement sympathique, le film est une vraie déclaration d'amour au jazz et aux jazzmen, manouches ou non.

 

Une ombre plane au-dessus du film : celle de Django Reinhardt, guitariste de génie qui finit sa carrière avec seulement huit doigts valides mais resta tout de même le prince parmi les princes. On ne verra jamais son visage, et pourtant il hante chaque bobine tout comme il hante Emmet Ray (Sean Penn, étonnant), musicien doué mais ayant souffert toute sa vie de ne pas arriver à la cheville du maître. Son ego démesuré et son attitude souvent déplacée à l'égard des femmes en font non seulement un sale type, et aussi et surtout un fascinant personnage de cinéma, le genre de pourri pétri de défauts mais qu'on en vient tout de même à aimer. C'est là le talent de Woody Allen : rendre attachant ce mec en faisant ressortir son humanité et son tempérament d'artiste.

 

Et puis, chose rare, Accords et désaccords est un film où Woody ferme un peu sa gueule. Traditionnellement très bavard, il pose très souvent sa plume pour nous laisser apprécier les ambiances musicales et les véritables exploits des spécialistes. Et lorsqu'Emmet Ray rencontre enfin une femme qu'il a envie de respecter, celle-ci s'avère être sourde et muette, d'où des échanges forcément particuliers. Samantha Morton apporte son physique lunaire et livre une prestation proche du mime, ultime hommage rendu par Woody Allen à ce début de vingtième siècle qu'il affectionne tant.

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