Critique : Puisque nous sommes nés

Nicolas Thys | 1 février 2009
Nicolas Thys | 1 février 2009

Alors que la fiction tend à se faire de plus en plus réaliste, le documentaire se fait de plus en plus poétique et invente ou réinvente chaque fois de nouvelles formes. Cette semaine 2 exemples: Of Time & the city et Puisque nous sommes nés. Le second, au titre à la fois délicat et fataliste se met au niveau de deux adolescents brésiliens de la région du Nordeste, particulièrement touchée par la misère, et les laisse parler de leur vie, de leurs espérances et d'un passé délicat qu'ils doivent dépasser et avec lequel ils devront composer afin de ne plus simplement « être nés » mais de pouvoir vivre aussi. L'un a vu son père mourir dans ses bras plus jeune et le second vit avec sa mère et ses 9 frères et sœurs nés de 9 pères différents.

 

Sans racine, les protagonistes sont finalement deux apprentis voyageurs sur le départ qui ne voient que la route comme issue, départ qu'on espère avec eux mais qu'on ne verra pas. Deux êtres à la recherche d'un ailleurs qu'ils imaginent, perdus entre l'enfance et le monde adulte, entre une existence qu'ils n'ont pas voulu mais qu'ils doivent subir, entre les merveilles d'une insouciance évanouie et la cruauté de la vie quotidienne : effervescence d'un univers bruyant et sombre, vivant mais malade et sans cesse au bord de l'agonie.

 

La poésie vient de l'universalité du thème abordé, de la manière qu'ont les deux cinéastes Jean-Pierre Duret et Andrea Santana, de ne pas chercher à entrer dans la caricature habituelle de la violence et de la pauvreté. Au contraire, comme dans leurs deux précédents films Romance de terre et d'eau et Le Rêve de Sao Paulo (voir ici), ils s'aventurent hors des sentiers battus, filment le monde et le laissent apparaitre dans toute son ambigüité.

 

Aucune interview n'a été réalisée. Enfants comme adultes se livrent comme ils se livreraient au quotidien, comme chacun pourrait le faire, ce qui apporte une poésie naturelle à l'ensemble contenu dans cette petite phrase : « Il faut qu'on parte pour savoir qui on est ». Produit par Jamel Debouzze, qu'on attendait pas dans un tel registre, Puisque nous sommes nés est un film sur la terre et la quête d'identité sans message, sans discours, sans morale, sans a priori. Juste un regard et c'est ce qui fait sa force.

Résumé

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