Afterschool : critique

Julien Foussereau | 11 septembre 2008 - MAJ : 20/11/2018 14:49
Julien Foussereau | 11 septembre 2008 - MAJ : 20/11/2018 14:49

Une plongée en eaux troubles signée Antonio Campos, avec Ezra Miller.

Afterschool s'ouvre sur une image attendrissante, celle d'un bébé hilare au point de tomber à la renverse. On conseillera vivement aux éventuels intéressés par le premier long-métrage d'Antonio Campos de prendre une grande respiration devant ce commencement tant la suite s'apparente à une plongée en eaux troubles. Campos ne lâche pas Robert de sa caméra statique, froide et oppressante, jeune lycéen dans un pensionnat d'élite de la côte Est. Robert est plutôt du genre renfermé et adore regarder sur Internet des vidéos amateures choquantes (bagarre de jeunes filles, vidéos pornos POV hardcore, etc...) Fraîchement intégré à l'atelier vidéo, Robert filme par hasard la mort par overdose des sœurs jumelles les plus populaires de son école préparatoire.

 

 

Ce qui saute immédiatement aux yeux quand on regarde Afterschool, c'est la singulière maîtrise du cadrage de Campos. Pas de ce savoir-faire technique tapageur consistant à surdécouper ou rechercher la belle image à tout prix. Afterschool en est la parfaite antithèse. Campos privilégie les prises fleuves, à angles fixes, ne s'autorisant que quelques panoramiques ou travellings à de rares occasions. Le traitement réaliste de sa mise en scène génère très rapidement un sentiment de malaise lorsque, en plus, la bande-son proscrit toute musique de fosse afin de favoriser un son direct assourdissant. Il rappelle en cela cette école de l'enregistrement du réel dans sa plus pure crudité tel Michael Haneke et son Benny's Video pour le côté fiction ou encore Frederick Wiseman dans le documentaire.

 

 

Alors, avec une profession de foi stylistique aussi affirmée, il va sans dire que Afterschool n'est pas une œuvre des plus accessibles. Son étirement du temps notamment risquerait bien d'en rebuter plus d'un. Par ailleurs, Campos pose une problématique très actuelle -le régime d'images choquantes aussi infini qu'incontrôlable via Internet, la gestion émotionnelle de celui-ci par les adolescents et son influence sur leur identité- mais avoue son incapacité à y répondre. Au final, Campos et nous, spectateurs, regardons Robert telle une énigme existentielle et le laissons dans un dernier plan glaçant à la croisée des chemins, entre l'adolescent perturbé et le psychopathe révélé. Afterschool ou L'Etranger de Camus à l'heure de YouTube ?

 

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