The Wrestler : Critique

Laurent Pécha | 5 septembre 2008
Laurent Pécha | 5 septembre 2008

Darren Aronofsky-Mickey Rourke dans un film sur le catch ! Un trio improbable qui nous fait entrer dans la salle avec un mélange de curiosité et d’appréhension. On ressort 1h 45 plus tard avec une larme qui coule le long de la joue, profondément ému par une œuvre définitive à la richesse de lecture qui ne cesse de croître à mesure que l’on discute du film, entre deux pincements pour être sûr de ne pas avoir rêvé. On a ici envie de crier notre amour inconsidéré pour The Wrestler et l’occasion qu’il nous offre d’enfin saluer le retour de cet immense comédien qu’est Mickey Rourke, qui vient juste de remporter le Golden Globe du meilleur acteur et qui est très bien parti pour les Oscars (MAJ/ bon, Sean Penn ne l'a pas volé finalement pour Milk mais quand même !).

 

 

La déchéance de l’acteur dans les années 90 est (involontairement) pour beaucoup dans l’aura et la puissance émotionnelle du film de Darren Aronofsky. Même si l’auteur de The Fountain n’a pas écrit son scénario en pensant à l’interprète d’Angel heart, comment imaginer un dixième de seconde un autre que lui dans le rôle de Randy « The Ram » Robinson, cette ancienne gloire du catch qui survit grâce à des combats médiocres, vivant misérablement dans une caravane tout en contant fleurette à une strip-teaseuse au grand cœur. Il s'agit peut-être là d'une des plus grandes performances d'acteur qui soit. A l’instar de Stallone dans Rocky Balboa qui se mettait à nu, Rourke donne tout ce qu’il a en s’inspirant directement de son passé. On assiste alors à une troublante et bouleversante confession intime où l’art imite la vie et se nourrit d’elle pour atteindre une sorte d’apothéose de film parfait. Car, oui, The Wrestler est un film de bout en bout maîtrisé et le jury de la Mostra de Venise 2008 présidé par Win Wenders ne s'y est trompé en lui attribuant le Lion d'Or.

 

 

Et s’il doit sa charge émotionnelle immense à Mickey Rourke, il ne faut pas oublier que derrière la caméra se cache un prodigieux cinéaste (et c’est quelqu’un qui n’appréciait pas ses deux premiers films qui l’écrit). Un artiste capable de changer complètement de style visuel, ici tout en caméra à l’épaule pour être aux côtés d’un Randy omniprésent, pour coller au mieux aux sentiments qu’il veut faire naître. Un conteur hors pair capable de vous plonger dans l’univers du catch comme si c’était votre sport préféré depuis la nuit des temps. A ce titre, non content d’offrir une humanité aussi surprenante qu’exaltante à ses « monstres de foire », Aronofsky signe instantanément les séquences de référence sur la manière de filmer ce sport si spectaculaire. Et ceci en toute simplicité, comme si tout était d’une évidence confondante.

 

 

D’une grande modestie, le réalisateur s’appuie sur le récit ultra classique de la rédemption, mais il n’a de cesse de l’enrichir de petites séquences qui le transcende. Au point que cette histoire de champion qui veut raccrocher sans jamais vraiment pouvoir et qui rêve secrètement d’une gloire qu’il ne pourra jamais plus connaître, on en fait la sienne. Entre espoir et crainte ! Et les personnages qui gravitent autour de The Ram, avec en figure de proue la strip-teaseuse (Marisa Tomei, belle, sensible, troublante,...) et la fille abandonnée (une Evan Rachel Wood à fleur de peau), comme autant de (im)possibilités à notre héros fatigué de trouver enfin sa voie dans ce monde qui l’a rejeté.

 

Résumé

A l’image d’un final sublime, l’une des plus grandes scènes que le cinéma américain nous ait offert depuis 20 ans, The Wrestler nous fait chavirer de bonheur. Le bonheur de voir qu’un acteur génial peut rencontrer un cinéaste brillant et se servir de sa vie et de ses souffrances pour atteindre l’idéal cinématographique.

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