La Vie devant ses yeux : Critique

Julien Foussereau | 1 septembre 2008
Julien Foussereau | 1 septembre 2008

Vadim Prelman avait fait forte impression à ses débuts avec House of Sand and Fog, inédit chez nous, grâce au recul et à la pertinence de son regard slave sur la société américaine, l'énorme travail de sa direction d'acteurs et son impressionnant sens visuel. Rien que pour ses superbes compositions à base de nuages et d'éléments naturels soulignant le caractère immuable des choses de la vie, Vadim Perelman en disait long sur notre violente nature engendrant des erreurs condamnées à être inlassablement répétées. Premier film remarquable et auteur à suivre...

Il est important de rappeler à quel point Perelman avait visé juste en adaptant le roman d'Andre Dubus, cela permet de mesurer sa dégringolade avec La Vie devant ses yeux, deuxième film et incroyable plantage en règle. Diana et Maureen sont les deux ados inséparables dans leur bourgade du Connecticut. La première est l'exacte opposée de la seconde ; la blonde délurée, fumeuse de joints aux mœurs légères vs. la brune pieuse et prude attendant le prince charmant et le coït postnuptial. Un malade fait irruption au lycée avec un M-16, descend tout ce qui bouge avant de mettre en joue les deux amies. Quinze ans plus tard, Diana est prof d'histoire de l'art, assagie et maman d'une gamine aussi turbulente qu'elle ado. A la veille de la commémoration de cette tragédie « Columbienne », Diana perd pied à force de revivre ce sombre évènement et voir des gens censément morts. L'histoire est aussi ambitieuse que le traitement formel. D'ailleurs, les amateurs de House of Sand and Fog seront en terrain connu dès l'ouverture panthéiste sauf que la tentative de greffe se solde par un beau rejet.

 

 

Perelman ne parvient jamais à donner le bon tempo à son film. Il n'est pas aidé en cela par un scénario se rêvant vertigineux par ses enchevêtrements temporels mais se révèle essentiellement soporifique par ses questionnements existentiels à destination des demeurés. Le passé est-il vraiment le passé ? Le présent, présent ? Ou absent ? En outre, le fossé entre les intentions scénaristiques et le résultat à l'écran lui est très préjudiciable. S'envisageant comme éthéré, le récit de La Vie devant ses yeux apparaît surtout comme artificiel, une mécanique branlante s'articulant autour d'un twist fumeux, démontable avant le premier tiers, déjà vu ailleurs en bien mieux. Avant d'en arriver là, il faudra toute la patience du monde afin de se fader des séquences où onirisme rime avec ralenti à outrance et esthétique de pub pour serviettes anti-fuite. Evan Rachel Wood et Uma Thurman ont beau se démener comme des diablesses pour donner corps à Diana, elles ne peuvent pas lutter contre la platitude des dialogues qu'on leur met en bouche, véritables véhicules pour philo de comptoir.

 

Résumé

C'est un peu ça, le gros problème de La Vie devant ses yeux : s'affirmer comme profond et existentiel alors que sa vanité et sa prétention sautent aux yeux. Telle une grenouille voulant être plus grosse qu'un bœuf. Seulement, à la différence de la fable de La Fontaine, la baudruche est déjà crevée avant même de commencer à pomper.

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