Critique : Alexandra

Nicolas Thys | 16 juillet 2008
Nicolas Thys | 16 juillet 2008
Rarement un film de guerre n'aura été aussi paisible qu'Alexandra. Paisible et non pacifique car Sokurov prend rarement partie mais révèle simplement l'humanité et la souffrance de soldats et de civils qui avant tout n'appartiennent pas à une nation mais sont simplement des êtres humains avec des craintes, des désirs, un langage, des souvenirs et surtout un besoin d'amour énorme face à la brutalité démesurée qu'on perçoit en eux.

 

D'ailleurs Sokurov a-t-il vraiment fait un film de guerre ? Alexandra parle de la Tchétchénie occupée à l'époque actuelle et aurait pu être violent et dévastateur en choisissant de montrer une cruauté sans nom comme Spielberg le fait dans les premières minutes de Il faut sauver le soldat Ryan. Mais le réalisateur des Elégies ne prend pas cette voie et malgré les immeubles en ruine, les difficultés que subissent un peuple soumis et les soldats qui parcourent le campement et qu'on ne quitte jamais, il ne distille jamais la peur et l'angoisse mais au contraire le réconfort.

 

Une vieille dame venue voir son petit-fils officier débarque dans un campement viril et sordide et sa présence incongrue apporte à chacun un réconfort maternel dont il a besoin. La réalisation, toujours calme, même lors des travellings, au montage rare et coulant, instaure un climat de quiétude extrême que l'étrangeté des éclairages nocturnes et la blancheur éblouissante et chaudes des lumières diurnes ne viennent que renforcer.

 

Le film, d'une simplicité inhabituelle, touche parfois au sensible par instant comme lors de ce bref frôlement de main entre la dame âgée et un haut gradée, mélange de retenue forcée et de désir de retrouver une innocence perdue à jamais. En un gros plan, à première vue trivial mais émouvant, le cinéaste résume tous les plus beaux discours sur l'amour filial. Délaissant l'action et le politique Alexandra joue sur une suspension et une pesanteur cotonneuse et feutrée dont on aimerait ne jamais vraiment sortir.

 

Ni héroïne, ni porte parole, ni belliqueuse, ni pacifiste, Alexandra est juste elle-même. Et la vie continue et suit son cours...

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