Critique : Un tueur dans la foule

Réalisé en 1976, Un tueur dans la foule est un condensé du cinéma des seventies, reprenant parfois jusqu'à la caricature, et c'est là peut-être son plus gros défaut, la plupart des thèmes fétiches (car il s'agit presque parfois de fétichisme) de cette époque. D'une part un tueur isolé et une possible tentative de meurtre contre le président qui rappellent immanquablement l'attentat commis sur JFK plus que jamais présent dans les mémoires. D'autre part la paranoïa d'une foule monstrueuse, condensée dans un stade pour un match de football, que la possibilité d'un attentat fait se désagréger. Dans la peur l'individu prime et c'est une police impuissante qui s'efforce de canaliser et d'endiguer l'ensemble.

D'autres grands thèmes sous-jacents sont également présents, parfois montrés, parfois juste abordés au détour d'une réplique. Par exemple le fantasme d'une image totale qui permettrait de voir partout au même instant et donc d'épier chaque personne à distance dans un soit disant dessein sécuritaire. Une forme d'ubiquité qui se traduit par la multiplication des caméras dans le stade et des écrans dans la salle de contrôle, par une pénétration directe au cœur de l'image à l'aide de multiples gros plans ou de zooms qui permettront de mieux la scruter, d'en faire surgir les détails et d'avoir une impression de pouvoir absolu sur l'univers étriqué du film et sur les individus.

Ce sujet central, privation de liberté en échange d'une sécurité maximale est d'ailleurs plus que jamais d'actualité. Sur cette question le cinéaste tranche et, que l'on soit ou non d'accord, le parti pris est audacieux et totalement ancré dans les mentalités d'une époque où toutes les croyances s'effondrent. L'inefficacité des forces spéciales (S.W.A.T), leur incapacité à agir malgré une couverture sans cesse accrue de l'évènement sportif, leur difficulté à affronter un danger imminent, montre que toute surveillance est inutile. Quand le drame doit se jouer, même s'il est cerné à temps, il reste inéluctable.

Malgré certains aspects gênants, notamment un certain côté larmoyant par moments, ce film, doté d'un casting prestigieux, reste néanmoins un thriller implacable et très bien rythmé.