Critique : Les Bourreaux meurent aussi

Par Nicolas Thys
6 juin 2008
MAJ : 25 février 2020
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Difficile de ne pas comparer Les Bourreaux meurent aussi de Fritz Lang, au premier film Hollywoodien de Douglas Sirk, Hitler's madman : deux œuvres antinazies très réussies et réalisées coup sur coup par deux cinéastes allemands importants qui émigrèrent à Hollywood et dont les épouses respectives ont entretenu des liens avec le parti nazi (dont Thea von Harbou pour Lang, scénariste de nombre de ses films allemands).

 

Ces films ont pour point commun une thématique : l'assassinat de Heydrich, haut dignitaire du troisième Reich, par la résistance en Tchécoslovaquie en 1942. Pourtant le premier semble être le contrepoint du second, Sirk privilégiant l'aspect historique, même s'il est romancé, et tragique en se focalisant sur la manière dont a été monté ce coup d'éclat et la brutale répression qui le suivit, menant au massacre de tous les habitants du village de Lidice, alors que Fritz Lang, aidé par Berthold Brecht, conçoit davantage son film comme une lutte et le fait écrire à la manière d'un film policier, laissant de côté les préparatifs pour se focaliser sur l'organisation de la résistance.

 

Les Bourreaux… suit en fait le chemin de plusieurs personnages, ayant tous un rôle déterminant dans l'histoire, et de leurs ruptures et rapprochements jusqu'au coup d'éclat final. Très intelligemment écrit, le scénario, sans être aussi politiquement fort et proche du peuple que ne l'aurait voulu Brecht, permet à Lang de briller par une mise en scène très stylisée, parfois proche de ce qu'il a pu faire en Allemagne tant au niveau de la photographie que de l'importance accordée au moindre détail du décor et qui tend à caractériser chaque personnage.

 

Partagé entre une épure formelle lors des moments tragiques, comme cette séquence où un père récite une lettre à sa fille, et un décorum outrancier insistant clairement sur l'horrible opulence et la cruauté des nazis, Lang s'entoure également de brillants comédiens qu'ils emploient souvent à contre emploi et de l'un des plus importants compositeurs allemands répudié par le régime, Hans Eisler, et réalise ici un film majeur qui résonne à la fois comme un hommage à ses films allemands et à un pays qu'il souhaiterait voir libéré.

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