Critique : Le Libre arbitre

Nicolas Thys | 29 janvier 2008
Nicolas Thys | 29 janvier 2008

Le prologue du Libre arbitre revisite le mythe de Frankenstein : un colosse pulsionnel, impuissant face au mal qu'il fait, joué par un acteur au physique impressionnant ne s'exprimant que par des cris ou des râles. Son crime est celui de la chair et de sa faiblesse : dans certains cas d'énervement, il ne peut se contrôler et viole, frappe ou tue.

 
Dans la première partie la violence seule est rattachée au corps, le désir et le plaisir sont les seuls interdits. La caméra ultra mobile, toujours à l'épaule, près des visages ne vient que conforter cette violence initiale, toujours présente malgré une tentative de démarrer une nouvelle vie. Mais le titre fausse la donne : le libre arbitre existe t-il ? L'unique finalité sera la prise de conscience de son être monstrueux, anormal et incurable : même en essayant il ne parviendra pas à lutter contre ce qu'il est. Il n'a pas sa place et ne l'aura jamais ici bas.

 
Le point de vue du réalisateur tout au long du film sera la monstration et la mise à mal de cette chair dans ce qu'elle a de plus viscérale, immonde et répulsif : les séquences de viol, frontales, sont insoutenables, crues, exposées dans toute leur sauvagerie et leur horreur. Idem pour la sexualité, sujet majeur du film : aucun tabou n'existe plus, les corps se mêlent, musculature indomptable face à une fragilité à fleur de peau, même le plaisir solitaire perd son intimité partagée avec le spectateur dans une scène pornographique d'une brutalité rare. Même l'amour, passionnel, est pris dans sa dimension maladive, nuisible au corps et à l'esprit et finalement seul l'inceste n'est qu'effleuré.

 
Les fluides corporels, sang, morve, sueur, etc. habituellement cachés sont ici délibérément exposés à la limite du supportable, c'est-à-dire ni trop pour éviter les travers du grotesque, ni trop peu pour parvenir au niveau de répulsion souhaité. La séquence finale est aussi le bouquet, moment ultime de dégoût où les corps ne deviennent que pure violence et crise démentielle, où ces écoulements intempestifs suintent à n'en plus finir dans une abomination sans nom.

 
Sans nier son évidente maîtrise du sujet le Libre arbitre se perd malheureusement dans son côté hyperréaliste (et non documentaire) en se jetant bien au-delà des limites de ce que le regard peut supporter. Il n'est plus alors qu'une expérience visuelle à tenter, ou non.

Résumé

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