Critique : Alouette, je te plumerai

Difficile de saisir toute l'ironie du propos sans avoir vu auparavant Vincent mis l'âne... car Alouette... est en quelque sorte une suite. Même nom de personnage dans les deux films pour le protagoniste : Pierre Vergne, et pour son fils : Vincent, même métier pour le vieillard : sculpteur, même caractère grognon et outrancier, même passé ombrageux d'escroc et de collabo.

Seuls quelques années et deux visages les séparent. Michel Bouquet est ici remplacé par un excellent Claude Chabrol et surtout, petite fantaisie du cinéaste : Lucchini qui dans le premier film jouait le fils de Pierre Vergne, devient ici le mari de celle qui le recueille et se prend de pitié pour ce pauvre vieillard roublard et sans cœur qui n'en mérite pas tant, bien au contraire.

Bouquet ayant pourri la vie de son fils dans le premier opus, il revient ici dans un corps différent mais semblable à plus d'un titre détruire celle d'un corps similaire mais d'un être différent. Comme si Zucca aimait s'en prendre à un physique, toujours le même, Lucchini tête à claques, mais sans le blesser, le putréfier ou le transformer, juste en jouant avec comme un enfant et son pantin. Comme si cette suite était une suite impossible à cause de la répétition d'un être et de la non-répétition de l'autre et qu'il fallait faire disparaître le plus discrètement possible ces deux figures étrangères qui n'ont pas leur place.

A partir de là on comprend mieux le désarroi de Valérie Allain qui ne peut que se retrouver seule sans même pleurer : elle s'est trompée de film, ou l'a rêvé tout simplement et doit désormais reprendre le cours de sa vie normale, ou se fabriquer un nouveau film, plus cohérent cette fois ! Interprétation amusante ou tirée par les cheveux direz-vous mais qui, après avoir vu les deux films et le reste de l'œuvre aussi courte que dense de Zucca, coule de source, surtout quand on sait à quel point il aimait les facéties, les rebondissements inexpliqués et les faux-semblants.