Critique : Rouge-gorge

Le cinéma de Zucca est décidemment étonnant. Rouge-gorge est un hommage de cinéphile au cinéma qu'il affectionne par le biais d'une certaine modernité post nouvelle-vague qu'affectionnaient certains cinéastes comme Rohmer ou Eustache par exemple. Mais cette fois Zucca fait marche arrière et s'en prend au film noir et aux pirateries.

A l'aide de quelques indices cinéphiliques : un M sur une cassette, un petit air siffloté faisant réagir certains comme un réflexe pavlovien, quelques notes lancinantes en leitmotiv mystérieux et ainsi de suite, le cinéaste nous entraine dans un jeu de pistes étrange et noir où au travers de rencontre fortuites, plusieurs éléments disparates s'agencent pour donner lieu à une histoire retorse au classicisme avoué mais qui n'a pas fini de surprendre.

L'enfance est également au cœur même du film : comptines, références à des contes de fées, superstitions, etc. Un vaste monde rêvé où tout semble vrai mais jusqu'à quel point ? Ce Rouge-gorge à l'atmosphère énigmatique, inquiète. Des décors et lumières anormalement expressives ou ternes : un appartement mêlant un bleu mort et un rouge cru, un néon où seul les lettres MOR clignotent, un Paris grisâtre et une vitrine en guise de chambre. Des personnages bizarres tout droit sortis de nulle-part qui ne cessent de disparaître et de réapparaitre. Où Zucca a-t-il bien voulu nous emmener ?

Peut-être dans les confins du cinéma et de ses mécanismes sous-jacents, dans un espèce de labyrinthe qui révèle peu à peu ses secrets de fabrication en nous parlant, d'une manière qui n'appartient qu'à lui, d'un univers cinéphilique aujourd'hui disparu et dont il nous livre certaines traces, celles qui ont regardées son enfance comme dirait l'autre, et la nôtre aussi d'un certain point de vue...