Critique : Sukiyaki Western Django

Julien Foussereau | 6 septembre 2007
Julien Foussereau | 6 septembre 2007
On connaît surtout Takashi Miike pour ses débordements dans le registre gore / provocation malsaine. Qu'il s'agisse de Audition ou Gozu, il se débrouillait toujours pour nous écoeurer avec l'amputation d'un membre au fil à couper le beurre ou le fracas d'un caniche sur une vitrine de magasin, le tout dans une imagerie des plus cheap. « Envoyez des sioux à Miike ! » que l'on disait même en notre for intérieur. C'est aujourd'hui chose faite avec Sukiyaki Western Django, à mi-chemin entre le jeu de massacre barré dont le cinéaste a le secret et un véritable hommage aux westerns (spaghettis et classiques) ayant bercé notre enfance de pied tendre.

Dans un Far West transposé au Japon, une petite ville est plongée dans le chaos à cause d'une guerre interminable entre le clan des Rouges et celui des Blancs. Un homme sans nom débarque dans ce lieu que l'on dit maudit pour rechercher un fabuleux trésor. Se greffent à cette trame, une bataille millénaire autour d'une fleur sacrée, des comptes à régler avec le passé et Quentin Tarentino, trop heureux de faire mumuse en desperado buriné dans un western nippon. Vous vous sentez perdus ? Pire, vous n'y comprenez rien ? Soyez les bienvenus chez Miike le bordélique, alors ! Ou les « pas bienvenus », à en juger par la centaine de journalistes (des femmes pour la plupart) ayant pris leur jambe à leur cou après quelques minutes de ce film référentiel qui s'adresse majoritairement aux geeks.

Il faut dire que, passé la plaisante intro by Tarantino, Sukiyaki Western Django n'y va pas avec le dos de la spatule : les acteurs japonais s'expriment dans un anglais calamiteux (merci les sous-titres !),  le ralentissement de l'intrigue dû à d'interminables flash-backs est pour le moins artificiel et, le tord-boyaux final s'apparente à un personnage de shérif pénible dont l'indécision à choisir un clan se manifeste par une schizophrénie balourde qui n'est pas sans rappeler les franchouillardises de Paul Préboist. Peut-être cela tient-il à la note d'intention de Miike, vouloir enfiler un maximum de clin d'oeils aux références du genre. Seulement, les hommages, c'est comme les variétés d'alcool, à trop les mélanger, on risque la régurgitation. Et Sukiyaki Western Django n'en est jamais très loin.

C'est pourtant la mécanique capitale des plus grands westerns spaghetti, réussir la montée en tension avant le déluge de coups de feu tant attendu et redouté. Sur le premier point, Sukiyaki... n'est pas concluant. Par contre, il se révèle assez efficace sur le second, notamment dans son utilisation de la violence tantôt cartoonesque -un trou dans le buffet à la Tex Avery- tantôt surréaliste à grand renfort de sang et de longue agonie. Cette dernière partie sauve le film grâce à la convocation des pièces maîtresses de l'histoire du western. De l'intégrale Leone à l'inévitable Django de Corbucci en passant par Duel au soleil de King Vidor, tous y passent et deviennent bizarrement d'amusants reflets déviants de ces joyaux.

Cette dose de fun assez salutaire ne fait pas de Sukiyaki... le film jubilatoire venu mettre un coup de fouet à une compétition vénitienne un peu morne. Il reste suffisamment plaisant néanmoins pour les amateurs de dingueries en provenance du Soleil Levant.

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