Critique : Billy Budd

Nicolas Thys | 28 août 2007
Nicolas Thys | 28 août 2007

Six ans avant Théorème de Pier Paolo Pasolini, dans lequel il était une espèce d'apparition quasi mystique dont tous tombaient sous le charme avant de sombrer dans une folie douce, Terence Stamp interprétait déjà un rôle similaire, la charge sexuelle en moins, dans le Billy Budd de Peter Ustinov, film étrange et captivant à plus d'un titre.

Réalisé en 1962, à une époque où, à Hollywood, les genres se décomposaient et s'entremêlaient à volonté, ce film en déconcertera plus d'un. Son affiche laisse présager un film de corsaires, le début promet un film de guerre, il n'en sera rien. Bien loin de tout cela Billy Budd est un inclassable : des navires, des marins, des canons, une époque belliqueuse et pourtant aucun combat, aucune révolte. Au contraire, de l'eau à perte de vue, un décor quasi théâtral, une figure du bien, une figure du mal, de nombreuses remises en questions, peu d'action, une épure stylistique totale ; tout est réduit au minimum pour engendrer un film sur l'homme, ses raisons et ses passions des plus troublants.

Ici le navire ressemblerait presque à une « Nef des fous », ces vaisseaux moyenâgeux qui transportaient, dans la littérature et la peinture, des fous d'un pays à un autre, le fou, représentant la mort et la vie, révélant à tout un chacun une part de lui-même et du monde. Stamp est d'ailleurs une figure quasi messianique. Il ne sait d'où il vient, ni même quel âge il peut avoir et sa position sur le navire est cruciale ; hunier, il voit tout, plus loin que les autres. Blondinet ingénu au visage d'ange, sa jeunesse cache une force extraordinaire. A son contact même les brutes sont envoutées. Il n'attire aucune jalousie, que de la sympathie voire plus. Philanthrope et ingénu, il n'a pas peur de l'homme, il craint simplement ses excès et tente de comprendre le mal, représenté ici sous les traits de Robert Ryan en maître d'équipage torturé dont le passé est un mystère, pour l'apprivoiser.

Le bateau semble appartenir à un autre monde, une vie intérieure dont le retour sur terre est impossible, une sorte de purgatoire, une lutte entre le cœur et l'esprit, la loi et la foi. Le final, court et superbe est inéluctable, fatalité à l'œuvre dans un autre monde où chacun doit choisir sa voie...

Résumé

Newsletter Ecranlarge
Recevez chaque jour les news, critiques et dossiers essentiels d'Écran Large.

Lecteurs

(0.0)

Votre note ?

commentaires
Aucun commentaire.
votre commentaire