Critique : L'Homme du Bois-Brésil

Nicolas Thys | 2 juillet 2007
Nicolas Thys | 2 juillet 2007

Le dernier long métrage de Joaquim Pedro de Andrade, L'Homme de Bois-Brésil, réalisé en 1981 peut-être considéré comme un film testament. Le cinéaste a trouvé dans l'œuvre autobiographique de l'écrivain moderniste Oswald de Andrade1, qu'il adapte ici librement, matière à réunir les thèmes fétiches et les principales aspirations et préoccupations qui l'occupent depuis ses tout débuts.

Mais si le film est bel et bien une petite merveille, il peut paraître obscur à qui le voit pour la première fois sans connaître un minimum l'histoire du Brésil et la filmographie du réalisateur brésilien. Le premier quart du 20eme siècle est marqué en Europe et surtout en France par l'arrivée d'un renouveau dans les arts plastiques et les lettres : Picasso ou Fernand Léger en peinture et Cendrars, Apollinaire ou les surréalistes qui émergent avec un nouveau type d'écriture et côtoient la montée du communisme après la révolution de 1917. Le Brésil subit lui aussi ces influences et à partir de la Semaine d'Art Moderne de 1922 se développe une tendance nouvelle qui touchera l'ensemble des arts, à l'exception du cinéma, avec notamment le mouvement Pau-Brasil, donnant son nom au film, qui valorise l'identité brésilienne ou un mouvement dit « anthropophage » auquel Joaquim Pedro de Andrade fait référence.

Pourquoi une telle parenthèse ? car L'Homme du Bois-Brésil n'est autre qu'une histoire réécrite de cette époque à partir de la vie d'une de ses figures littéraires les plus marquantes. Et on y retrouve l'intégralité du cinéaste : ses acteurs réguliers comme Grande Otelo, son goût pour les femmes et l'érotisme exacerbé et lubrique de Guerre conjugale, la folie, la liberté et le recours au mythe de Macunaima, les revendications politiques et la critique des faux intellectuels des Conspirateurs, l'hypocrisie religieuse du Prêtre et de la jeune femme mais aussi le thème du double puisque le protagoniste est double, interprété par deux acteurs en même temps, un masculin et l'autre féminin, dans un fantasme qui n'appartient qu'à lui.

Par ce film J.P. de Andrade marque sa filiation directe avec cette époque moderniste d'avant guerre qu'il n'a pourtant jamais connue et exprime clairement son intention de faire du Cinéma Novo un lieu d'expérimentation et de création à partir des thèmes fondateurs de la pensée culturelle brésilienne.

1 Aucun lien de parenté avec Joaquim pedro de andrade

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