Critique : Sempre vivu ! (Qui a dit que nous étions morts ?)

Patrick Antona | 12 juin 2007
Patrick Antona | 12 juin 2007
Rares sont les films qui arrivent sur les grands écrans de l'Hexagone avec l'ambition de raconter une histoire « régionale ». Et le part-pris est d'autant plus courageux que cette histoire se situe en Corse

Loin de la carte postale réductrice qui avait servi de cadre à L'Enquête Corse, un des derniers films avec Le Silence qui mettait en scène l'île de Beauté et ses habitants, Sempre vivu ! Qui a dit que nous étions morts est une œuvre sympathique et revigorante.

S'appuyant essentiellement sur ses comédiens, mêlant adroitement casting local et « continental », Robin Renucci livre un premier film qui lorgne vers la comédie à l'italienne, à la façon des Mario Monicelli et Ettore Scola, sans se montrer aussi féroces.

Mais dans ce florilège où se mêlent entourloupe politique (sport national très prisé), règlements de comptes familiaux où le sexe n'est pas absent (tempérament latin oblige), et une ode au particularisme culturel (sans tomber dans le pamphlet élitiste), le réalisateur nous fait partager presque de l'intérieur la vie contrariée de ces villageois sans jamais lasser le spectateur. N'hésitant pas à recourir au fantastique, que ce soit pour matérialiser l'antagonisme politique de deux beaux-frères ou pour évoquer le passé idyllique d'un vieux couple, ou à user d'une forme de poésie visuelle que l'on croyait oublier dans le cinéma français, l'ex-comédien (Escalier C, Masques) réussit son coup d'essai dans la réalisation sans sombrer dans la mièvrerie bienveillante.

Et autre preuve de son inaltérable croyance dans une culture qu'on ne doit en rien marginaliser, le corse est utilisé dans une part non négligeable des dialogues, ce qui est une véritable première dans le cinéma français. Même si le sous-titrage est de rigueur, la musicalité de la langue et la mise en perspective des différentes situations fait que la pilule passe sans aucun problème, établissant à la longue une forme de connivence avec les acteurs, dont la plupart sont issus de troupes locales. Mais loin de se limiter à l'humour tendance folklorique, Robin Renucci donne le relief nécessaire, avec quelques raccourcis hasardeux parfois, pour comprendre les enjeux de cette farce aux résonances qui dépassent le simple cadre de la Corse.

 

Car dans un monde où l'uniformité semble être de mise et la voix des petites gens passée sous silence, le titre du film rappelle qu'il y aura toujours quelqu'un qui dira « nous sommes encore vivants » (traduction littérale de Sempre Vivu !).

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