Critique : Arnaques, crimes et botanique

Erwan Desbois | 5 décembre 2005
Erwan Desbois | 5 décembre 2005

Petit polar britannique sans prétention au succès surprise, Arnaques, crimes et botanique fut un formidable accélérateur de carrière pour Guy Ritchie (qui signait là son premier film) et Jason Statham. Il est d'ailleurs amusant de remarquer à ce sujet que Statham est loin de tenir le rôle principal ; au contraire, il est le plus effacé de la bande des quatre héros du film. Soit quatre jeunes anglais ni très compétents ni très malins qui, après s'être faits plumer 500 000 livres aux cartes par un truand véreux (pléonasme ?), ont une semaine pour rembourser et décident pour cela de voler le butin de gangsters ayant eux-mêmes réalisé un hold-up chez des revendeurs d'herbe… Vous vous y perdez ? C'est normal, et voulu par Guy Ritchie qui prend un malin plaisir à développer une demi-douzaine d'intrigues parallèles qu'il relie les unes aux autres à l'insu des personnages afin de les faire entrer en collision dans le dernier tiers du récit.


Ce procédé peu original, Ritchie le pousse à l'extrême pour un résultat à double tranchant. La première moitié de Arnaques, crimes et botanique est ainsi une longue exposition terriblement ennuyeuse et qui manque cruellement de rythme. Les effets mis en œuvre pour tenter de se démarquer du polar classique – voix-off ironique, dialogues à la Tarantino pour introduire les personnages… – sont tellement surlignés qu'ils en deviennent particulièrement agaçants et desservent le film. Et ce ne sont pas la caméra très statique et les ellipses brutales (trahissant un budget limité) qui arrangent les choses.


Et puis, à force d'abnégation et de construction rigoureuse, Arnaques, crimes et botanique parvient somme toute à convaincre lorsque les premiers croisements impromptus se produisent – en particulier grâce à un mur très mal insonorisé, qui permet aux héros de découvrir le projet de braquage de leurs voisins gangsters, puis à ces derniers de comprendre qui leur a dérobé l'argent et la drogue. L'absurde des situations déride nos zygomatiques, sans pour autant faire du film une parodie simpliste ; Ritchie parvient en effet à trouver l'équilibre qui fait de Arnaques, crimes et botanique un vrai polar (avec ses antihéros maudits, ses méchants charismatiques, sa violence et sa « morale ») possédant en plus un ton décalé.


L'un des meilleurs atouts du film réside dans ses personnages, qui finissent par développer des caractères forts et de ce fait imposer une vraie présence. Grâce en soit surtout rendue aux acteurs, qui font preuve d'un charisme et d'une assurance à toute épreuve et perpétuent ainsi la tradition des « gueules » chères au polar à l'anglaise. On retiendra en particulier la performance hilarante de Vas Blackwood en chef de bande black singulièrement irrité par la tournure des évènements, et un réjouissant caméo de Sting. La combinaison de ce casting sans failles avec l'inventivité de Ritchie et l'excellente bande-son rock aboutit à un divertissement certes mineur mais très appréciable. Et qui reste, malgré ses défauts et un épilogue bâclé laissant un goût d'inachevé, infiniment supérieur aux derniers « machins » réalisés par Guy Ritchie (A la dérive et Revolver) !

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