Critique : Rébellion

Patrick Antona | 30 septembre 2005
Patrick Antona | 30 septembre 2005

Rébellion n'est pas l'un des films les plus connus de son auteur, le maître Masaki Kobayashi (Harakiri, Kwaïdan, la trilogie La condition humaine) mais il représente, comme les oeuvres précitées, ce qu'il y a de plus pur dans le style du réalisateur japonais.


Adapté d'un roman de Yasuhiko Takiguchi et construit sur une trame similaire à celle de Harakiri, antérieur de cinq ans, à savoir une première partie permettant de poser les éléments structurants du drame à venir, et une seconde partie sincèrement plus enlevée où le dynamisme de l'action permet de jouir d'un spectacle total, Rébellion se présente comme une épure du genre mais jamais rébarbative ni pesante. S'appuyant sur l'interprétation sans faille de Toshirô Mifune, impérial dans le rôle de l'armurier Sasaha, alliant puissance émotive et sobriété, opposé de nouveau à un Tatsuya Nakadai au jeu monolithique surprenant, Kobayashi montre aussi son talent dans la direction de nombreux seconds rôles correctement exploités.


Mais Rébellion ne saurait se résumer à l'affrontement machiste de deux des plus grandes icônes du chambara car Kobayashi, par le biais du personnage féminin de Ichi (interprétée par Yoko Tsukasa), se permet de dresser un portrait de femme intègre et rebelle, à l'égal des hommes, et dont la détermination sera le pivot central de l'intrigue.


Le sens de l'esthétique de Kobayashi transparaît dans de nombreux plans, par exemple dans les scènes de joutes verbales entre seigneurs avec un décor découpé comme un jeu de go ou encore lors de l'assaut du sanctuaire des Sasaha par les gardes du shogun félon, avec son découpage et une utilisation du cadre particulièrement travaillés. Autre moment mémorable, le duel furieux entre Mifune et Nakadai se révèle être de toute beauté, même si Kobayashi répète le « gimmick » des blés balancés par le vent comme dans Harakiri et que le tout dernier acte du film (une scène de cache-cache meurtrière entre Mifune et des arquebusiers) traîne un peu en longueur, quoique l'on retrouve ici comme un parfum d'affrontement à un contre cent qui concluait sa saga Musahi.


Mais tout ceci n'entache en rien un spectacle de grande qualité, de facture classique mais dans lequel Kobayashi réussit à glisser quelques touches de modernité (voir la scène où Ichi découvre l'avanie du shogun en plans fixes) et où la réflexion sur la nécessité du sentiment de révolte, ici concentré dans un noyau familial opposé à un ordre féodal injuste et partial, rejoint par essence les grands thèmes du cinéma, au-delà du simple film de samouraï. Et le fait de savoir que nombre des scènes de combat ont été tournées avec de vrais sabres devrait être un plus pour attirer le spectateur potentiel, en mal de vrais scènes d'action !

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