Critique : Gozu

Patrick Antona | 24 août 2005
Patrick Antona | 24 août 2005

Tourné en 2003 par un Takashi Miike survolté qui enchaînait alors tournage sur tournage (et qui les enchaîne toujours !), Gozu reste une des oeuvres les moins intéressantes du maître du cinéma bizarroïde made in Japan. Sans être une déception de taille, il est vrai que, venant de l'auteur de Auditionet de la trilogie Dead or alive, on s'attendait à une vision plus extrême pour cette nouvelle plongée dans le monde interlope des yakuzas. Si le film est déjanté et réussit à dégager une certaine ambiance morbide, son rythme lancinant et surtout son manque de substance au niveau de l'histoire finissent par rendre sa vision un peu pénible.


Certes, Miike réussit à ménager quelques moments chocs, mais en les cantonnant au début et surtout à la fin de Gozu, on a dû mal à entrer dans ce nouvel univers et à s'intéresser à toute une galerie de personnages bizarres qui nous est présenté. Sorte d'« Alice au pays des merveilles » sous acide situé dans un environnement industriel délabré, Gozu ne possède ni la frénésie des autres films barrés de Miike tels Ishi the killer ou Dead or alive, ni la tension dramatique de Audition ou Visitor Q. Malgré ses évidents emprunts à David Lynch (ici on n'entre pas dans l'au-delà en soulevant un rideau mais en ouvrant un panneau) ou à Seijun Suzuki, et l'utilisation d'une symbolique sexuelle plus qu'explicite, Takashi Miike ne réussit pas à construire un univers assez « cohérent » pour que le spectateur puisse se sentir impliquer, voir déranger par une intrigue bien trop légère.


Reste quelques scènes qui, grâce à leur parti pris excentrique et à l'interprétation de leurs comédiens, permettent de re-évaluer le film. Si bien sûr son final-choc reste « Miikien » dans toute sa démesure (une constante dans son oeuvre depuis Fudoh) et peut être considérée comme un des musts issus de l'imagination délirante du réalisateur, il y a celles plus drôles où Hideki Sone est confrontée à la patronne de l'auberge au talent si particulier et bien sûr la scène d'introduction avec l'exécution d'un chien accusé d'être « anti-yakuza » par un Sho Aikawa en crise hallucinatoire ! Et que dire de Renji Ishibashi en chef mafieux qui ne prend son pied qu'avec une louche enfoncée dans le fondement ! Encore une preuve de l'humour outrancier que Miike réussit à disséminer dans son film mais qui malheureusement, n'arrive pas à élever le film au-dessus de la folie de ces différentes séquences. Si Takashi Miike demeure un auteur à suivre, Gozu ne restera pas le meilleur exemple de ce que le japonais fou peut produire.

Résumé

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