Critique : Les Rivières pourpres 2 : Les Anges de l'apocalypse

Laurent Pécha | 9 octobre 2004
Laurent Pécha | 9 octobre 2004

Après Mathieu Kassovitz, qui s'est d'ailleurs vu ouvrir les portes d'Hollywood (Gothika) par Joel Silver suite à la réalisation des Rivières pourpres, c'est un autre talentueux jeune cinéaste au visuel très marqué que le producteur Ilan Goldman est allé chercher : Olivier Dahan. Le réalisateur de l'excellent Déjà mort, du semi-raté Le Petit Poucet et de l'émouvant La Vie promise s'investit à fond dans cette œuvre de commande bien loin de ce qu'il nous avait jusque-là offert. À l'image d'une séquence d'ouverture outrancière, la découverte macabre d'un corps emmuré dans un monastère un soir d'orage, Dahan donne parfaitement le change et le ton de ce que vont être ces (ses) Rivières pourpres 2.

Généreux dans son atmosphère, cherchant toujours à grossir le trait, à appuyer tous ses effets (les meurtres sont particulièrement graphiques), il fait du cinéma de genre avec une évidente passion pour la chose. Faisant fi d'un scénario signé Besson, pourtant prometteur dans sa première partie (tant qu'on n'y comprend rien, on marche à fond) mais désespérément mal exploité par la suite, et de dialogues la plupart du temps risibles ou consternants (selon l'humeur), Olivier Dahan démontre un savoir-faire visuel remarquable. Savoir-faire qui devient même époustouflant lors d'une séquence de poursuite à pied entre Reda (Magimel ultra convaincant en « remplaçant » de Cassel) et un moine aux prouesses physiques « yamakasiennes », une poursuite à la durée imposante où la richesse des péripéties n'a d'égal que celle des cadrages magnifiés par un montage à l'efficacité diabolique.
Sur le terrain de l'action, donc, Les Rivières pourpres 2 surpasse largement son prédécesseur et aurait même tendance à en faire trop (à l'image d'une fusillade de voiture complètement gratuite). Comme pour le film de Kassovitz, Dahan a eu droit à la crème des techniciens français. Le look de son film s'avère ainsi tout aussi riche et soigné : photo incroyablement travaillée et variée, décors majestueux mais aussi insolites (la cabane des pêcheurs), musique imposante qui ne fait toutefois pas oublier celle de Bruno Coulais, un son d'une précision et d'une puissance impressionnantes… Bref, RP2 a de la gueule !

Alors, oui, il faudra repasser pour avoir une intrigue réellement satisfaisante, puisque plus le film avance et plus l'aspect religieux et ésotérique du récit prête à sourire (à l'image du rôle de touriste de Christopher Lee). Oui, on est loin d'être en présence de personnages à la psychologie travaillée (Niemans/Réno, toujours excellent, a comme pour seul trait de caractère très marqué d'avoir peur des chiens… comme dans le premier ; le rôle de la flic femme est pathétique, la pauvre Camille Natta ne s'en sortant presque jamais, empêtrée dans des situations et des dialogues particulièrement ridicules). Oui, le canevas du premier film est plus ou moins rigoureusement repris (mais cela a son charme), avec la même façon de présenter les personnages, les mêmes doubles enquêtes qui se rejoignent… Mais au diable les imperfections et les facilités pourvu qu'on ait l'ivresse ! C'est le rôle qu'avait à assumer Olivier Dahan et le bonhomme s'en est admirablement sorti.

Mis à part un final bâclé (Besson ayant mal pompé et mal mixé les climax des deux premiers Indiana Jones) mais qui a le mérite, au moins par rapport au premier film, de ne pas laisser les spectateurs sur la touche (certes, à ce moment-là, il n'y a plus grand chose à comprendre), Dahan, en boostant constamment son récit, fait plus qu'honneur à la future trilogie des Rivières pourpres. On attend désormais avec impatience Florent Emilio Siri, prochain réalisateur sur les rangs pour clore les débats. En beauté ? Au vu de ce que le réalisateur nous avait offert avec Nid de guêpes, le doute est difficilement possible.

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