Immortel (ad vitam) : critique de la femme piège

Stéphane Argentin | 5 octobre 2004 - MAJ : 15/05/2019 15:51
Stéphane Argentin | 5 octobre 2004 - MAJ : 15/05/2019 15:51

Difficile de savoir sur quel pied danser devant ce véritable ovni cinématographique qu'est Immortel, ad vitam ! Œuvre de science-fiction, d'anticipation, d'animation, thriller policier futuriste, histoire d'amour… Le film de Bilal est un mélange de tant de références et de trouvailles visuelles (Blade runner, Le Cinquième Élément, Stargate, Metropolis, Final fantasy, Brazil…) et thématiques (divinités, religions, politiques, débordements scientifiques…), qu'il en déroutera assurément plus d'un.

Lui-même auteur et dessinateur de bandes dessinées, mais aussi décorateur ou encore costumier sur plusieurs films et chorégraphies sur scène, Enki Bilal est un artiste reconnu et célébré de par le monde depuis près de trente ans maintenant, et Immortel, librement adapté de sa Trilogie Nikopol (La Femme piège, La Foire aux immortels et Froid équateur), représente assurément aux yeux de l'artiste sa création (créature ?) la plus aboutie, la plus polymorphe, celle qui regroupe et brasse tous les genres et tous les arts.

Quel que soit l'endroit où porte le regard 1h40 durant, il n'y a pas le plus petit morceau de pellicule, le moindre recoin d'image qui ne recèle une richesse architecturale, texturale et colorimétrique. Qu'il s'agisse des tenues vestimentaires, des moyens de locomotion, des bâtiments, des armes, des objets du quotidien, et même des… créatures, tout semble avoir été pensé et conçu dans un but bien précis : servir une histoire à mi-chemin entre le melting-pot visuel d'un Final fantasy et la thématique mytique du réplicant blade-runnerien.

 

 

Car, loin de n'être qu'un simple exercice graphique de style, Immortel est aussi et avant tout un incroyable vivier de thèmes : existence de Dieu, de divinités, d'êtres supérieurs (on pense au Cinquième élément), magouilles politiques, dangers et réglementations des avancées biotechnologiques telles que le clonage et les greffes d'organes (Bienvenue à Gattaca)…, autant d'influences condensées avec plus ou moins de cohérence et de cohésion en sein d'une seule et même fiction, qui, bien que positionnée avec précision en un lieu (la Terre, New York) et une date donnée (2095), se veut intemporelle et presque immatérielle, immortelle et ad vitam.

 

 

Toujours à l'affût de nouveaux modes d'expression, et armé d'un budget à la hauteur de ses ambitions artistiques, le dessinateur culte au graphisme visionnaire a accouché in fine d'un film hybride qui ne ressemble à rien de connu. Empruntant à la BD, à l'animation, aux jeux vidéo, mélangeant images de syntèse et acteurs de chair et d'os, Bilal signe un troisième film qui lui ressemble, un magma d'images dont se dégage une vraie poésie. Mais, bien que conscient d'assister à une mise en image d'un artiste doué, la plupart des spectateurs en sont ressortis frustrés, ayant eu bien du mal à s'y projeter, gênés par cette richesse visuelle et thématique à laquelle il manque un vrai carcan scénaristique (les images animées ne se satisfont pas du même type d'écriture que les vignettes d'une BD). Il n'empêche, Immortel, ad vitam est sans conteste une œuvre bien à part au sein du paysage cinématographique, mais dont la vision reste indispensable ne serait-ce que pour se faire sa propre opinion.

 

Résumé

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