Critique : Nathalie...

Fabien Braule | 10 septembre 2007
Fabien Braule | 10 septembre 2007

« On ne fait plus l'amour, on ne se touche plus… peut-être que c'est inévitable. »

D'un libéralisme évident et décomplexé mettant à nu les fantasmes les plus insoupçonnés, jusqu'à un constat douloureux sur la vie de famille, multipliant les cassures sentimentales et psychologiques, le film de couple marque sans doute mieux que quiconque l'évolution des mœurs à travers les époques auxquelles il se rattache. De Belle de jour à Eyes wide shut, en passant par le plus récent 5x2, tous apportent, au sein de l'art cinématographique, un renouveau plus ou moins éloquent sur la manière de vivre une histoire, une liaison, qu'elle soit d'un soir ou d'une vie. Nathalie…, le dernier film d'Anne Fontaine, s'inscrit lui aussi dans cette optique, celle de faire du cinéma le garant d'une époque, tout en échappant à quelque jugement simpliste, tant ce dernier pourrait paraître au final trop hâtif.

 

 

Dans un appartement parisien, le spectateur, témoin ou voyeur, assiste au déroulement d'une fête à l'ambiance feutrée. Passé le générique, la caméra s'invite et brise très rapidement l'impression d'harmonie et de bonheur d'abord ressentie. On comprend très vite qu'il est question d'adultère et de femme bafouée dans sa chair. Anne Fontaine filme ici un pur objet de fantasme qui allie au mensonge la manipulation de deux femmes, opposées et complémentaires à la fois. Catherine (Fanny Ardant), femme bourgeoise, porte en elle toute la frigidité du couple. Nathalie (Emmanuelle Béart), blonde fatale et call girl, extériorise tous les fantasmes masculins, qu'il s'agisse de ses jeux de scène ou de ses récits érotiques et pervers. Et si, autour de ces deux femmes, vient se greffer le personnage de Bernard (Gérard Depardieu), c'est avant tout pour souligner le contraste de deux vies, de deux aventures (celle du foyer et celle qui lui est extérieure). La réalisatrice ne prendra jamais la décision de mettre à profit le potentiel d'un triangle amoureux pour le moins équivoque. Les rapports sexuels entre Bernard et Nathalie ne sont ainsi qu'évoqués au cours de rencontres secrètes entre les deux femmes, véritable couple à l'écran. De cette alchimie naît une cassure, Catherine, peu à peu jalouse et piégée, devient la principale cause d'une inéluctable rupture.

 

 

Cependant, malgré ses qualités évidentes, Nathalie… n'arrive pas à tenir en haleine sur toute sa longueur. Car au-delà du fantasme, le film est à l'image du personnage de Fanny Ardant, frigide et quelque peu instable. En multipliant les séquences de rencontres et de récits érotiques, Anne Fontaine accuse dès lors de nombreux problèmes de rythme, liés principalement à la succession de certaines séquences que l'on a l'impression de voir se répéter jusqu'à plus soif. La partition de Michael Nyman ne fait finalement qu'alourdir l'ensemble, tant elle donne, elle aussi, l'impression d'avoir été entendue des dizaines de fois dans d'autres films, 24 Heures de la vie d'une femme et La Fin d'une liaison principalement. C'est d'autant plus dommage que le trio d'acteurs, remarquable, donne le meilleur de lui-même. Depardieu n'a jamais été aussi sobre depuis longtemps et le couple féminin diffuse une ambiance obsédante qui hypnotise littéralement le spectateur, notamment grâce aux timbres de voix antithétiques de ses deux actrices.

 

 

L'un dans l'autre, le dernier film d'Anne Fontaine déçoit quelque peu, la faute à son scénario trop étiré et répétitif. Nathalie… n'en demeure pas moins un film à voir, dont on préférera dire qu'il est à moitié réussi plutôt qu'à moitié raté.

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