Critique : Jacquou le Croquant

Marjolaine Gout | 17 janvier 2007
Marjolaine Gout | 17 janvier 2007

Laissant de côté Mylène Farmer, Laurent Boutonnat, replonge dans l'expérience du long-métrage après l'échec de Giorgino pour signer avec Jacquou le croquant un bon gros mélo carabiné.

Malgré une constante recherche de perfection à recréer à l'image de la Dordogne du XIXème siècle, l'esthétisme de Boutonnat (notamment ses références au peintre Millet et ses Glaneuses) laisse de marbre tout comme sa capacité à nous narrer l'histoire de son croquant vengeur. Sous la plume d'Eugène Le Roy, Jacquou était une métaphore du combat des paysans, l'effigie des insurrections paysannes. Sous la caméra ampoulée de Boutonnat, il n'est plus qu'un vulgaire héros, à mi chemin entre le redresseur de torts et le vengeur impitoyable.

Après une enfance bien remplie défiant le record des misères de Cosette (mort de son chien, condamnation puis mort de son père, agonie de sa mère, tentative de suicide,…), Jacquou renaît de ses cendres et se mute peu à peu en un dieu implacable. Kronos des paysans ou José Bové de notre époque, faucille à la main il surgit de sa campagne pour ébranler la bourgeoisie et se venger de celle-ci, à l'origine de ses malheurs. Pas de place pour une once de subtilité dans cette mission implacable. Tout est ici affaire de premier degré avec le ridicule qui sied à tant manichéisme. Cela faisait bien longtemps que la frontière entre les gentils et les méchants n'avait pas été aussi délimitée. À ce titre, rendons hommage au très mais alors super très méchant Comte de Nansac qui s'évertue à rendre la vie de notre Jacquou vraiment mais alors vraiment pénible.

Dans ce croquis du Périgord mi-roumain mi-studio au découpage filmique affreux, aux flash-backs redondants et à la musique aussi omniprésente qu'insupportable, on sauvera la simplicité du jeu de Léo Legrand (Jacquou jeune) et l'apparition lumineuse de Bojana Panic, comédienne débutante qui apporte à La Galiote, unique personnage nuancé, tiraillé entre le bien et le mal, un charisme impressionnant.

Jacquou le croquant vu par Laurent Boutonnat, c'est finalement une recette qui ressemblait à ça : une pincée de Rémi sans famille, un doigt de La Petite maison dans la prairie, on mélange bien, un soupçon de Lassie et un zest de La Mélodie du bonheur. Dans un moule de 35mm, laisser frémir durant 2h25, puis saupoudrer (ayez la main lourde) de mélo. Vos croquants seront fins prêts à déguster. Mais attention à l'indigestion, vous êtes prévenus.

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