Critique : Qui de nous deux

Lucile Bellan | 8 mai 2006
Lucile Bellan | 8 mai 2006

Salomé Blechmans interprète le rôle principal de Qui de nous deux, réalisé par son père Charles Belmont, monté par sa mère Marielle Issartel (mais trois noms différents au générique histoire de brouiller les pistes ?) et tiré d'un faux journal intime dont elle est elle-même l'auteur. Le rôle le plus énigmatique du film, le fameux R – « comme la lettre » (sic!) – est joué par Clément Sibony, acteur le plus connu du casting et aussi… très bon ami de la famille ! Une entreprise qui peut être résumée en un mot : moi, moi, moi et encore moi.

Ce film est donc le fruit d'un texte intitulé « Le journal de Bébé » écrit par Salomé Blechmans et où elle a eu « l'humilité » de nommer son personnage Bethsabée Pasolini. Au fil du film Bébé vivra des aventures et mésaventures (mort d'un proche, agression sexuelle) qui sont censées la faire évoluer vers le monde des adultes et qui, en fait, ne dépeignent pas du tout une réalité mais bien une association de clichés sur l'adolescence. Ils prennent vite des allures de bravades racontées par une amie plus « délurée » que soi, et surtout un peu mytho : mon petit copain est le mec le plus romantique de la terre ; ce mec me désirait tellement qu'il a failli me violer… mais j'ai réussi à l'assommer ; j'ai réussi à aller en boite hier soir, etc. j'en passe et des meilleures.

Mais Qui de nous deux, c'est aussi l'influence du Journal de Bridget Jones sur une génération de gamines trop jeunes pour comprendre et qui n'en ont tiré qu'une chose : une liste de poncifs auxquels il fallait adhérer pour être une femme (les pleurs devant les films à l'eau de rose, la boulimie de chocolat, l'alcool et les cigarettes, l'impression d'être toujours trop grosse…). Conséquence de cela, quelques scènes ridicules et pathétiques de gamines en nuisettes (très important la nuisette) qui essayent de parler de sexe comme des femmes en mangeant des cookies, ou l'écoute intensive de la bande originale de Sexe intentions. Cela aurait pu être profond si toutes ces scènes, et toutes les autres, n'étaient pas désamorcées par le jeu exécrable de l'actrice principale, particulièrement horripilante surtout quand elle ouvre la bouche. Mais le pire est que ce personnage de Bethsabée se veut une généralité alors qu'il est tout le contraire : une ado triste de bêtise, archétype de ceux qui n'ont jamais souffert et qui ne le comprenne même pas, fille de bobos parisiens, qui croit comprendre le monde parce qu'elle observe les gens dans le bus.

Bethsabée (Bébé pour les intimes, difficile de ne pas râler devant la référence à Dirty dancing) porte un tatouage, un piercing, possède un iPod, ne porte quasiment que des fringues griffées et enfin à 17 ans écluse les boites de nuit de Paris. Difficile donc de s'attacher et encore moins de s'identifier à ce personnage creux, grandiloquent et prétentieux. Les personnages secondaires (amies diverses et quasi interchangeables, garçons) ne réussissent, au mieux, qu'à passer pour de sombres crétins (« après la pause tu me feras une liste de ce que tu aimes et de ce tu n'aimes pas comme ça on se connaîtra mieux !!! »), mais n'arrivent pas à rendre le film plus sympathique pour autant.

La référence directe à M (« qui de nous deux » est le titre d'une chanson, d'un album et d'une tournée du groupe) est réduite à deux extraits dans le film et tient alors plus du produit d'appel. Les mélomanes, eux, peuvent passer leur chemin.

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