Critique : Le Bal des chattes sauvages

Magali Cirillo | 13 décembre 2005
Magali Cirillo | 13 décembre 2005

Contrairement à ce que son titre français peut le laisser croire, Le Bal des chattes sauvages n'est pas un film érotique sado-maso mais bel et bien un documentaire. Un titre malicieux choisit par la réalisatrice,Veronika Minder, à la fois pour son ambiguïté et parce qu'il s'agit du nom d'un « club pour femmes » de Genève. Un humour que l'on retrouve tout au long de ce film qui traite d'un sujet peu abordé au cinéma (et ailleurs) : l'homosexualité féminine. Grâce à de multiples images d'archive et aux témoignages de 5 femmes suisses de générations différentes, nous partons à la découverte de cent ans d'histoire. Ainsi Johanna (93 ans), Liva (72 ans), Ursula (60 ans), Heidi (50 ans) et Samira (25 ans) nous dévoilent sans tabou leurs parcours, leurs difficultés et leurs combats. Drôles et hauts en couleurs, ces récits nous ouvrent les portes d'un milieu et d'une culture que nous ne connaissons pas forcément.

Mis en regard, ils soulignent l'évolution des mœurs et du regard de l'autre. En fonction de son époque, chaque femme vit son homosexualité de façon différente. Tout d'abord totalement niées, puis condamnées à la clandestinité et montrées du doigt, des décennies se sont écoulées avant que les lesbiennes soient enfin entendues. Un combat indissociable de celui des féministes, même si, à certaines périodes, les deux mouvements se sont visiblement éloignés l'un de l'autre. Il est d'ailleurs intéressant de voir comment les différentes générations s'opposent lorsqu'on évoque les deux dernières batailles des homosexuels : le mariage et l'adoption. Ainsi Johanna ne comprend pas le désir de maternité des jeunes lesbiennes, Ursula ne supporte pas les pacsées en robe de mariées, tandis que la plus jeune, Samira, ne comprend pas pourquoi elle ne pourrait pas mettre de jupe et rester féminine… Paradoxe de l'être humain : plus les lesbiennes sont acceptées par la société, moins elles semblent vouloir se différencier et jouer la carte de la provocation.

Mais il ne faut pas oublier que ces femmes parlent avant tout d'amour. Ah, les larmes de Johanna lorsqu'elle se souvient de sa compagne aujourd'hui disparue, le petit sourire coquin de Liva lorsqu'elle nous décrit l'une de ses petites amies et le sérieux de Samira quand elle nous confie ses « trucs » anti-routine.

Touchantes et attachantes (même si le snobisme d'Ursula peut parfois agacer !), ces cinq suissesses offrent chacune un visage différent de l'homosexualité féminine dans ce documentaire jamais ennuyeux. Toutefois, le spectateur peut conserver un regret : celui de ne pas avoir entendu de témoignage d'une femme mûre non militante et évoluant dans un milieu modeste. Mais cette femme-là voudrait-elle témoigner ?

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