Critique : B-Happy

Erwan Desbois | 27 mai 2005
Erwan Desbois | 27 mai 2005

B-Happy, septième film du metteur en scène Gonzalo Justiniano, est le premier à sortir dans les salles françaises, dans la foulée d'autres longs-métrages chiliens comme le récent Mon ami Machuca. B-Happy partage d'ailleurs avec ce dernier film son actrice principale, la jeune Manuela Martelli. L'ordre des sorties chez nous est trompeur, car B-Happy fut la première expérience de cette dernière devant la caméra – caméra qui ne la quittera quasiment jamais pendant les quatre-vingt-dix minutes du film.

B-Happy nous conte la vie de Katty, une adolescente vivant dans un petit village perdu dans la campagne chilienne. Une existence relativement monotone, entre sa famille (son grand frère et leur mère), l'école et les premiers flirts, qui va être chamboulée par la sortie de prison de son père Radomir. Katty voudrait se rapprocher de lui afin de rattraper les années perdues, mais la reprise par Radomir de ses anciennes activités criminelles (braquages et autres larcins) réduit ces efforts à néant en même temps qu'elle nuit à l'unité de la famille. Dans ces scènes familiales tout comme dans le reste du film, Justiniano accroche sa caméra sur Katty, son visage et ses réactions – ou plutôt son absence de réactions. Quelque soit la dureté des situations auxquelles elle doit faire face, la jeune femme fait preuve d'une détermination à toute épreuve qui la pousse à aller de l'avant sans se poser de questions et à tout mettre en œuvre pour trouver des solutions aux problèmes de sa vie. Comme elle le dit elle-même en voix-off, Katty n'a « peur de rien » : ni de prendre les choses en main avec le garçon qui lui plait au moment de passer à l'acte pour la première fois, ni de travailler au magasin général du village en remplacement de sa mère lorsque cette dernière meurt, ni de se prostituer pour payer les médicaments dont son père a besoin.

Cet acharnement du réalisateur vis-à-vis de son héroïne, à laquelle il n'épargne rien, nuit à la crédibilité de B-Happy et lui ôte de sa force. Il n'y avait en effet pas besoin de voir Katty subir un tel enchaînement de situations dégradantes et de drames arbitraires pour faire passer le message du film, inspiré d'une discussion que Justiniano a eu au hasard d'une rencontre avec une serveuse de quatorze ans dont l'opiniâtreté et le vécu l'ont touché. Heureusement, il y a la performance de Manuela Martelli, dont le sourire et la fraîcheur juvéniles cachent un charisme et une maîtrise impressionnants. Elle rattrape les défauts du film et emporte l'adhésion du spectateur en le touchant droit au cœur, faisant de B-Happy une oeuvre à l'image de Katty : imparfaite, mais entière et sincère.

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