Critique : Les 3 Chambres de la mélancolie

Sandy Gillet | 20 avril 2005
Sandy Gillet | 20 avril 2005

Les 3 chambres de la mélancolie est un documentaire qui traite des conséquences de la guerre en Tchétchénie auprès d'enfants, de part et d'autre de la ligne de front. En scindant son film en trois parties, la réalisatrice finlandaise Pirjo Honkasalo s'est attachée à nous montrer leur univers qui, quel que soit l'endroit choisi, n'a rien à voir avec celui de l'enfance. La caméra se veut dès lors sans concession, traquant implacablement ces visages encore imberbes et pourtant déjà marqués par la dureté voire l'injustice du monde des adultes.

Le film s'ouvre par les enfants soldats de l'Académie de Kronstadt en Russie qui, pour la plupart, sont orphelins (de pères morts en Tchétchénie ?) ou issus de familles nombreuses placés là par des parents qui veulent en faire des exemples et des héros. La réalisatrice filme les longs couloirs où résonnent les bruits de bottes, l'entraînement au salut militaire, les exercices physiques, bref la discipline rigoureuse et militaire inculquée à des enfants qui n'ont, tout au plus, que l'âge pour jouer aux petits soldats. Difficile de prendre du recul car notre regard est dirigé par de multiples gros plans et des intentions de cadres coercitives. Mais au détour de cette ambiance martiale se dégage la longue séquence au sein d'une Église orthodoxe qui permet aux enfants, le temps du recueillement, d'exprimer une certaine empathie quant au monde qui les entoure.

La seconde partie prend pour cadre la ville dévastée de Grozny, capitale de la Tchétchénie, où les ruines servent de décors aux jeux guerriers d'enfants laissés là à leur triste sort. C'est alors que l'on suit une femme qui recueille les progénitures d'une mère trop malade pour désormais s'en occuper et de les emmener au sein d'un établissement qui pourra les suivre et leur prodiguer le minimum d'attention et de soins auxquels ils ont droit. Optant ici pour le noir et blanc dans un souci évident mais condamnable de dramatisation du propos, le film dévie dès lors complètement de sa trajectoire et ne devient ni plus ni moins qu'un mauvais pamphlet pas même convaincant.

Reste alors la troisième chambre (on comprend mieux du coup le titre en forme de clin d'œil poético-bof), finalement la plus sobre, qui met en scène un camp de réfugiés tchétchènes à la frontière de l'Ingouchie. Là encore des enfants tentent de se composer une vie au sein d'une religion et de rites adultes qu'ils ne comprennent pas toujours. Un peu en écho à la première partie et sa séquence « pieuse », les enfants ici dansent et suivent un cérémonial séculaire à la fois sécurisant et source de tous leurs maux. Le spectateur sortira de la salle partagé par tant de subjectivité maladroite conséquence d'une réalisation qui n'évite aucun écueil et par ces regards d'enfants qui rappellent sans cesse l'inaltérable pureté de leur origine. Et cela, même un film un peu raccoleur, n'y peut rien.

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