Critique : Noirs dans les camps nazis

Aurélie Mayembo | 7 avril 2005
Aurélie Mayembo | 7 avril 2005

Il y a encore deux mois la déportation de noirs pendant la seconde guerre mondiale était une réalité historique méconnue. Seulement voilà, il y a deux mois Noirs dans les camps nazis (le livre) est paru, bénéficiant d'une large couverture médiatique et projetant sous les sunlights le réalisateur-auteur-journaliste Serge Bilé, ainsi que le crooner John William dont le témoignage est le temps fort du livre et du film.

Réalisé en 1995, à l'heure où « le sujet n'intéressait personne », Noirs dans les camps nazis est avant tout un documentaire de journaliste. Style dépouillé, succession d'interviews en plan fixe, commentaire narratif et informatif sont l'essentiel de ce film destiné initialement à la télévision. Serge Bilé, le réalisateur, n'a qu'une ambition : donner la parole à ces noirs - Africains, Antillais, Européens noirs ou métissés… - qui ont été déportés ou à ceux qui les ont connus. Une idée de départ intéressante mais traitée avec beaucoup de maladresse. D'abord, le film enchaîne les témoignages sans que l'on sache vraiment qui parle et de quoi. Ensuite, à trop vouloir montrer que les noirs ont connu la déportation, le réalisateur mélange des situations qui n'ont en commun que la couleur des personnes concernées. Quoi de commun entre des mulâtres allemands victimes des lois de Nuremberg et des résistants français (noirs, cela va sans dire) déportés pour actes de sabotage ?

Là où le documentaire est plus intéressant, c'est par son esquisse d'une histoire des noirs pendant la seconde guerre mondiale. Bref, quand ils montrent qu'ils ne se limitaient pas à une poignée de GI américains ou à des soldats des colonies. Grâce à des témoignages glanés en Belgique, au Sénégal, en France, en Espagne, Serge Bilé fait le portrait de personnages chaleureux et hauts en couleur (sans jeu de mots aucun !), comme Jean Nicolas, cet Haïtien qui pour survivre, se fit passer auprès des nazis, pour un GI, puis un médecin américain.

Pierre centrale du documentaire, le témoignage de John William, crooner franco-ivoirien, connu pour avoir chanté « Si toi aussi tu m'abandonnes » (la chanson en VF du Train sifflera trois fois). À 22 ans, l'homme fut déporté en Allemagne pour actes de résistance, dans le camp de Neuengamme. Une expérience qu'il confie à demi-mots. Littéralement sous le charme, le réalisateur Serge Bilé hisse son film un cran plus haut quand il filme un John William, visiblement gagné par l'émotion, chantant devant une foule d'anciens déportés.

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