Critique : Spanglish

Julien Welter | 23 février 2005
Julien Welter | 23 février 2005

De loin, le nouveau film du réalisateur de Pour le pire et pour le meilleur a les allures d'une gentille comédie américaine un peu mal foutue aux entournures. Bâti sur l'argument comique massue de l'immigrée clandestine (Paz Véga) qui ne parle pas un mot d'anglais et qui se retrouve au sein d'une famille bourgeoise où plus personne ne se comprend, l'histoire regorge de personnages attachants. La mère hystérique et dépressive (Téa Léoni), la fille aux problèmes de poids et le fils aux problèmes de comportement, la grand-mère alcoolique et le père cuisinier trop tendre (Adam Sandler). Tous prodiguent un humour de bon ton et réservent quelques éclats. Avec à sa disposition ce réservoir narratif, James L. Brooks navigue entre les histoires de solidarités féminines et de filiations croisées avant d'opter tardivement pour l'improbable love story. Plus qu'un film, c'est un buffet de récit qui mélange maladroitement les plats sans vraiment faire ressortir de saveur particulière. Paz Véga est sublime, Téa Léoni surjoue mais reste plaisante, Adam Sandler continue à astreindre son jeu à un P.T. régime Anderson (introversion gênée et débrayage en fureur méchante). Rien n'est vraiment bien amené, ni traité, mais le tout n'est pas méchant.

Sauf que de plus près, cet imbroglio improbable semble peu charitable. La narration suit, rappelons-le, la parole d'une seconde génération d'immigrés racontant l'intégration de la première. Le film est donc avant tout une comédie sur l'immigration. On pourrait se réjouir de cette audace si le récit ne se trouvait pas parasité par les problèmes de la famille bourgeoise américaine. Car c'est elle et son dysfonctionnement qui l'emporte sur le trajet de l'intégration et de la rencontre des cultures. Sa dépression moderne, son bien-être coupable et sa gentillesse mesquine qui constitue une première impolitesse vis-à-vis de son sujet initial. En quoi le sauvetage de cet american way of life est-il plus important que cette belle mexicaine et sa fille ? En tant que comédie, la finalité du récit devrait être heureux. Sans trop vous gâcher la surprise, on peut dire que le réalisateur conclut sur la non intégration de la première génération. Par souci de réalisme ? Depuis quand Hollywood s'en soucie-t-il ? Non, par manque de compassion.

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