Critique : De-Lovely

Stéphane Argentin | 5 octobre 2004
Stéphane Argentin | 5 octobre 2004

Avec son dernier film, De-Lovely, une chose est sûre à présent, Irwin Winkler était bien meilleur sparring-partner qu'il n'est réalisateur. Difficile en effet de comparer son travail en tant que producteur sur des films tels que L'Étoffe des héros, Raging bull ou bien New York, New York et en tant que réalisateur sur Traque sur Internet, Premier regard ou La Maison sur l'océan. Avec son petit penchant pour les drames et les comédies musicales, en plus de la boxe (il a produit toute la saga des Rocky), le voilà qui s'improvise aujourd'hui metteur en scène de musical.

Pour ses débuts dans le genre derrière la caméra, il aurait pu choisir cible plus modeste que la vie du mythique Cole Porter. Mais Winkler aime visiblement faire les choses en grand. Au départ, soit les quarante premières minutes, on ne lui donnera pas tort, tant les efforts artistiques et l'astucieux passage du présent à la pièce retraçant sa vie passée nous plonge rapidement dans l'univers de Porter, où l'on découvre un personnage instruit, raffiné, forte tête et aux goûts pluriels dans bien des domaines… Mais passé ce premier tiers de « posé du décor », Winkler perd tous ses moyens et se contente par la suite de filmer dans la plus totale platitude une succession de saynètes censées illustrer la vie de cet homme. S'en remettant au seul jeu des acteurs (rien à redire, comme toujours, du côté de Kline) et au travail de reconstitution (décors et costumes), il se loupe même complètement entre la comédie musicale et le drame, insistant trop sur le second et pas assez sur le premier. Filmées sans le moindre panache, les chorégraphies ne nous émerveillent pas (quelques leçons s'imposent pour Winkler, auprès de Baz Luhrmann par exemple). Manquant cruellement d'intensité, la relation entre Porter et sa femme Linda, aussi compliquée soit-elle, ne nous touche pas. Et, enfin, insistant très (trop ?) lourdement à grands coups de ralentis dans la chute des corps et d'agonie sur les lits de mort, le drame qui se noue nous laisse tout aussi indifférent. Des constats d'autant plus regrettables que, dès l'ouverture du film, la messe est dite : Porter finit en fauteuil roulant et sa femme est morte.

Des choix de traitement plus judicieux s'offraient assurément à Irwin Winkler pour transcender un sujet couru d'avance et offrir au défunt Cole Porter autre chose que ce portrait pâlichon. Peut-être aura-t-il appris qu'il ne suffisait pas seulement de chanter et de conjuguer De-Lovely à tous les temps et avec tous les verbes pour aboutir à une comédie musicale réussie.

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