65 - La Terre d'avant : critique Jurassic Crasse

Axelle Vacher | 14 mars 2023 - MAJ : 22/04/2023 13:22
Axelle Vacher | 14 mars 2023 - MAJ : 22/04/2023 13:22

Dans la vie, il y a des plaisirs simples : marcher sur le sable chaud, sentir l'odeur du café le matin, chanter faux sous la douche, ou encore, regarder des films avec de grosses bestioles qui rugissent très fort. Alors forcément, à l'annonce de 65 - La Terre d'avant, sorte de Jurassic Park/Jurassic World horrifique porté par Adam Driver, les expectatives d'un passe-temps joyeusement régressif ont atteint des sommets. Mais alors, comment diable justifier le navet derrière le concept prometteur ?

Arnaquosaurus Rex

C'est à ne rien y comprendre. Tout était là. Adam Driver propulsé en plein Crétacé, les gros dinosaures, le fusil laser, la promesse d'un divertissement bas de plafond et joyeusement bourrin. Vraiment, du caviar. Plus encore que son concept attractif au possible, le film profitait également d'une panoplie d'atouts qui fleuraient bon la valeur sûre.

Avec Sam Raimi à la production, le duo d'auteurs-réalisateurs Scott Beck et Bryan Woods (auxquels on doit notamment le scénario du très bon Sans un bruit) aux commandes du bébé, et un budget officiel de 45 millions de dollars (quoi que selon plusieurs bruits de couloirs, les estimations grimpent à 90 millions), comment se planter ? Difficile à dire. Mais 65 - La Terre d'avant l'a fait.

 

65 - La Terre d'avant : photo, Adam DriverVoir la douille venir de (très) loin

 

Après une séquence d'introduction pseudo mélodramatique dont le bien-fondé reste à prouver, le film plonge ex abrupto dans l'action. Après tout pourquoi pas. Inutile de prolonger les simagrées quand tout ce que le spectateur attend, c'est de voir une paire de gros bras bourriner du reptile à tout va.

Derrière cette tendance à donner sans tarder dans l'action se dresse toutefois une première ombre au tableau. Le constat est sans appel, jury et jurés tombent d'accord : les effets numériques, plus ou moins indispensables à toute restitution de lézard géant, sont effectués avec l'adresse d'un bambin qui découvre le feutre.

 

65 - La Terre d'avant : photo, Adam DriverDans les entrailles du concept

 

N'y allons pas par quatre chemins, c'est laid. Le naufrage spatial que subit le personnage principal avant de s'écraser sur une planète hostile semble tout droit sorti des années 80, tandis que les dinosaures rappellent davantage les indigences de Jurassic World  que le T-Rex de Spielberg en 1993. Et ce n'est que le début.

Le personnage de Driver échoué en terres inconnues, celui-ci découvre que seule une enfant (Ariana Greenblatt) a survécu au crash. Et là, c'est la débandade. Les enjeux du récit sont précipitamment déroulés au spectateur à l'aide d'un texte incrusté bêtement à même l'image. Le pilote et l'enfant ont atterri sur la croûte terrestre, quelque 65 millions d'années avant notre ère. Il n'y a pas douze mille interprétations à cette information fatidique : un certain caillou devrait venir leur chatouiller le crâne incessamment sous peu.

Malgré cela, le sentiment de danger reste aux abonnés absents. À mesure que les minutes passent, 65 - La Terre d'avant s'embourbe dans la même fange où d'autres productions similaires, telles que Life ou Underwater, se sont déjà noyées : celle des productions de série B à gros noms et gros sous coulés au box-office et achevés par la critique.

 

65 - La Terre d'avant : photo, Ariana Greenblatt"Mais ? Où sont les dinos ?"

 

65 raisons de les larguer

Si seulement la laideur du film était son unique défaut, il aurait été possible de s'en accommoder. Mais que nenni. Outre la mise en scène douteuse, le cadre approximatif et ses CGI en carton-pâte, 65 - La Terre d'avant est prodigieusement inengageant. À aucun moment le spectateur n'a l'occasion de se sentir un tantinet concerné par le sort de Mills et Koa, et ce en dépit de leurs histoires larmoyantes respectives.

Aucune des 93 minutes sur lesquelles s'étale le film n'a de quoi susciter l'attention, et encore moins le frisson ou l'adrénaline. Même regarder de la peinture sécher sur un mur semble plus passionnant.

 

65 - La Terre d'avant : photo, Adam DriverNon, ce plan n'a pas été recadré

 

En vérité, la soupe est si insipide qu'il est difficile de savoir quoi blâmer pour ce manque de goût. Pour le dire pleinement, le film est assommant, monotone, barbant, et tous les synonymes qui se rapportent de près ou de loin à l'ennui. Qu'il y ait davantage de deus ex machina que de bestioles à écailles est une chose, mais que le récit tourne en rond de la sorte sur une base plus simpliste qu'un coloriage monochrome en est une autre.

Les deux cinéastes se seraient-ils mouchés dans la serviette en papier sur laquelle était écrit le scénario ? Le monteur était-il en vacances au moment de la post-production ? Indiana Jones a-t-il retrouvé le découpage perdu ? Que quelqu'un fournisse les réponses, puisque le film ne s'en acquitte point.

Le fait est que même en étant d'humeur extrêmement conciliante, même en excusant les moult torts susmentionnés, rien n'est en mesure de défendre le raté absolu que sont les scènes d'action. C'est d'ailleurs là que réside le mystère principal de ce vaste bourbier : comment diable Scott Beck et Bryan Woods se sont-ils débrouillés pour aboutir à des séquences aussi désincarnées ? C'est une insulte aux dinosaures. Si les vertébrés pouvaient retourner leurs fossiles depuis l'au-delà, ils le feraient. 

 

65 - La Terre d'avant : photo, Ariana GreenblattEeeeeet, celui-là non plus

 

B comme Bancal

On ne peut pas dire que 65 - La Terre d'avant manquait de potentiel. Certes, il ne s'agissait pas de la proposition la plus cinéphile de l'année, mais qu'à cela ne tienne, il n'y a pas que Bergman et Tarkovski dans la vie, et on aurait très bien pu accepter que le résultat final prenne la forme d'un bon plaisir coupable. Mais pourquoi s'acharner autant à renier l'ADN du projet, clairement pensé pour la série B bête et méchante et non le thriller glaçant ? 

Plutôt que de s'abandonner pleinement à son concept boum-boum, le film cherche désespérément à se prendre au sérieux et singe la séquence émotion à de multiples reprises par soucis dramatique. Il aurait pourtant été si simple de faire de cette aventure un gentil passe-temps décomplexé, abrutissant et joyeusement excessif. Bye bye le fantasme du survival brut de décoffrage porté par un Adam Driver enragé. Franchement. Quel gâchis.

Au lieu de cela, le spectateur se retrouve face à un film suppliant qu'un minimum de légitimité lui soit accordé sans réellement savoir par quel moyen s'y prendre. L'ensemble est trop hasardeux, trop gauche pour que l'on y décèle réellement un quelconque propos, et même son acteur de tête semble complètement désinvesti.

 

65 : La Terre d'avant : photo, Adam DriverPenseraugroschèquepenseraugroschèque

 

Aussi, le pauvre bougre rompu à son passé militaire flirte allègrement avec le pilotage automatique pendant la vaste majorité de ses prises. Interprète et caméra ne savent manifestement pas quoi faire l'un de l'autre. Entre eux, une partition scénaristique confuse dresse une distance infranchissable.

S'il ne doit y avoir qu'une chose à retenir de 65 - La Terre d'avant, c'est un manuel de choses à ne pas reproduire (chez soi, chez les autres, ou n'importe où, vraiment). Pas assez mauvais pour être sympathique malgré lui, et définitivement pas assez médiocre pour être vaguement passable, le film de Scott Beck et Bryan Woods est définitivement de ceux dont le visionnage de la bande-annonce suffit.

 

65 - La Terre d'avant : affiche (2)

Résumé

65 - La Terre d'avant promet au spectateur un Adam Driver revenu à l'état sauvage et pléthore de gros lézards à dézinguer. Toutefois, plutôt que de respecter sa jouissive promesse, le film délivre une sorte de mélodrame balourd à tous les niveaux, rugissant ses lacunes à pleins poumons.

Autre avis Mathieu Jaborska
65 met un point d'honneur à abandonner ses bonnes idées les unes après les autres et n'est même pas assez généreux pour satisfaire les dinophiles les plus aguerris. Un véritable festival d'occasions manquées et le plus gros gâchis de l'année jusqu'ici.
Autre avis Geoffrey Crété
65 - La Terre d'avant réussit le triste exploit de quasiment tout rater dans son petit programme pourtant pas compliqué. Dans un autre monde, ça aurait été un plaisir simple de survie et de dinosaures. Là, c'est à ranger à côté d'After Earth.
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Lecteurs

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commentaires
Dino
13/11/2023 à 22:23

Franchement, je viens de le voir
Et j'ai trouvé ça plutôt pas mal.
Les trucages sont bien faits.
Je ne comprends pas toute cette haine envers ce film.

steve
16/10/2023 à 20:22

Voir Adam Driver se battre contre des dinos est un pur plaisir. Merci aux gens qui ont fait en sorte que ce film existe. Pur plaisir (coupable)

FredDoBrasil
03/09/2023 à 14:56

Film invraisemblable mais plutôt distrayant si on est dans un bon jour. le film dure 90 minutes et on trouve le temps de s'ennuyer. Adam Driver mérite quand même beaucoup mieux

shivattaque
23/08/2023 à 23:07

Je viens de le voir en VOD 4K HDR avec un débit très honorable en VO stfr, pour moi c'est une bonne série B avec un bon budget, ce qui a permis de faire des scènes dans l'espace et des dinosaures très bien réalisés. J'ai entendu dire que c'était moche. Je n'ai pas vu ou alors c'est mieux en VOD. Je ne sais pas en tout cas pour moi, les dinosaures étaient vraiment très bien fait.
J'ai mis la note de 3,5 car ce n'est pas un chef-d'oeuvre non plus mais j'ai passé un très bon moment et en lisant les commentaires de ce site j'avais tellement aucune attente. Que finalement je l'ai trouvé vachement bien.
Et pour ceux qui disent ouais mais c'est pas crédible, Ils ont inventé la fermeture éclair avant nous, si vraiment vous voulez partir sur ce terrain-là, sachez que plusieurs personnes peuvent avoir la même idée. Ça c'est pour le concept et ensuite on s'en fout. C'est une série b. On se laisse porter par le film et vu que c'est bien fait et ben c'est sympa.
J'aurais bien sûr voulu voir plus de gros combats de Dino mais ça aurait été encore moins crédible du coup et le dernier combat et déjà bien badass.
Si vous avez l'occasion du coup une soirée et vous aimez bien les séries b. Pas trop prise de tête, soupçonné de SF et de Dino et ben n'hésitez pas.

Bulossss
16/04/2023 à 20:53

Frédo du 31 Avec un film de ce budget ils vont pas s’amuser à inventer une langue aussi, faut pas trop chercher la petite bête

Bubu123
16/04/2023 à 20:49

Ce film mérite un peu mieux qu’un 1,5/5 perso

Raphaël
12/04/2023 à 22:36

1h30 de film et il y a des moments trop long....

Frédo du 31
12/04/2023 à 17:42

Attention spoilers!!!!

Les cinéastes nous ont pris pour des gros c...
Au début du film, on nous explique qu'avant même l'avènement de l'humanité, des civilisations parcourent les cieux et bla bla bla... Pour ensuite nous montrer la planète Somaris où l'on découvre notre petite famille de Somariens dont le papa est un de ces explorateurs de l'espace.
Le voilà parti en vadrouille intergalactique jusqu'à ce qu'il s'écrase sur Terre il y a 65 millions d'années, pile poil 2 jours avant l'extinction des dinosaures, le générique de fin nous montrant en accéléré ce qu'il s'est passé entre cette extinction et notre ère moderne (pas de doute, c'est la terre, on voit même la lune pendant le film). On en déduit donc que les Somariens modernes et cultivés avaient atteint notre niveau d'évolution 65 millions d'années avant nous qui n'étions même pas des singes.
Déjà ça c'est gros...
Mais pas que...
Si on rembobine un peu on s'aperçoit que les Somariens d'on ne sait pas trop quelle galaxie:

- parlent anglais, qui jusqu'à preuve du contraire est une langue née SUR TERRE il y a 64,9999999 millions d'années après l'extinction des dinosaures (et comme il ne laisse pas de dictionnaire sur place quand il repart, on imagine que ce sont de vrais TERRIENS qui ont créé cette langue il y a une fraction infinitésimale de temps à l'échelle de la durée d'existence de notre planète)
- connaissent les chiffres arabes qui sont apparus 3 siècles avant JC (donc à peu près il y a 64.9999999 millions d'années après l'extinction des dinosaures, même logique que l'anglais)
- ont déjà inventé la fermeture éclair, le sac à dos et fabriquent AUSSI leurs ceintures de sécurité en fibres de nylon tressées (ça c'est fort!) et avaient déjà inventé les écrans LCD
- ...et j'en passe, il y avait un truc TERRIEN post extinction des dinosaures à chaque plan...

De ce point de vue, et au delà de la faiblesse générale du métrage, je suis extrêmement déçu.
En gros, les terriens ont tout copié des somariens de la galaxie de l'autre bout de l'espace, 65 millions d'années plus tard (comment la Nasa a osé nous cacher ça!)
Portnawak total...

J'aurais préféré que ce soient des terriens, qui à la faveur d'une entourloupe type trou de ver, se retrouvent propulsés dans le passé, ça aurait été moins foutage de g... (un peu la même idée que la planète des singes qui pour le coup un un modèle de crédibilité)

Dr.ik
31/03/2023 à 17:58

@ marc en rage
Le début n aurait pas été un problème, s il avait été expliqué, si ça avait mené à quelque chose... mais non... sinon, autant dire que c est dans le futur sur une planète ressemblant a la notre et la l aspect des dinos n auraient souffert d aucune comparaison...

Après c est pas la pire daube de l année, il se regarde sans trop regarder sa montre, mais franchement il n apporte rien et se montre très décevant si on prend en compte la bande annonce et le début du film

Marc en RAGE
28/03/2023 à 16:24

@Dr.ik

Dès le début il y un problème nous voyons sur une planète inconnue SOMARIS Miles sa fille sa femme donc des humains en apparence. Sa mission le conduit après un crash sur la terre au temps de la préhistoire et de l'arrivée de la métherorite provoquant l'extinction des Dinosaures. Sa n'a évidemment aucune logique scientifique. Sinon c'est film de survie la relation entre Miles et Koa au fil de l'histoire est le seul intérêt de ce film.

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