Pulse : critique My Strange Addiction

Axelle Vacher | 22 février 2023 - MAJ : 22/02/2023 12:42
Axelle Vacher | 22 février 2023 - MAJ : 22/02/2023 12:42

En s'inspirant de son propre documentaire Never AgainAino Suni a réalisé Pulse, son premier long-métrage de fiction. Avec fougue et impétuosité, la jeune réalisatrice et scénariste scandinave propose un récit obsessionnel, sordide malgré une toile de fond solaire et le charisme infectieux de son duo d'interprètes. Autant de prémices qui ont de quoi engendrer quelques comparaisons hâtives avec Call Me By Your Name, bien que les similitudes s'arrêtent aux éléments susmentionnés. S'agirait-il d'une belle promesse d'avenir pour le cinéma de genre ?

Elle m’aime un peu, beaucoup, passionnément

L'oeuvre proposée par Aino Suni est aussi composite qu'elle est complexe, mais s'il fallait s'opiniâtrer à en esquisser une synthèse, les vers de Walt Whitman devraient s'en acquitter assez justement : "Je suis vaste, je contiens des multitudes”. Récit multilingue, multi-identitaire et multi-facettes, Pulse oscille sciemment entre les genres pour mieux les questionner.

Elina (Elsi Sloan) a 17 ans, le crâne rasé, une poignée d'ambitions artistiques, et la malhabileté synonyme à cette étape charnière de la construction identitaire. Brusquement déracinée de sa Finlande natale, l'adolescente est contrainte de s'exiler dans le sud de la France avec sa mère et son nouvel amant. Là, elle y rencontre sa belle soeur, Sofia, à laquelle la jeune Carmen Kassovitz prête ses traits, une jeune ballerine amatrice de soirées, de garçons et autres drogues récréatives.

 

Pulse : photo, Elsi SloanFreud l'aurait adoré

 

Pulse a beau être le premier long-métrage de fiction de sa cinéaste, cette dernière ne manque pas d'aplomb, et propose un essai aux ambitions esthétiques et narratives fortes, lesquelles excuseront amplement les inévitables maladresses dont souffre le film ; ce qu'il manque quelquefois en rythme et en fluidité au niveau des dialogues, Suni le compense par une identité visuelle soignée et l'authenticité de son concept.

Un ballet suffira à Elina pour tomber sous le charme, mais pour rester poète "on n'est pas sérieux quand on a dix-sept ans". Sérieux, non, définitivement pas. Dangereux ? Parfois.

Aussi, l'intrigue ne perd pas de temps à déployer l'amertume tapie dans l'ombre de ses couleurs vibrantes. Personne n'a jamais dit que la découverte du premier amour et la démesure propre à l'émoi adolescent étaient sages ; certains sont crus, malsains, cruels. Elina n'est pas initialement présentée au spectateur comme un personnage sinistre, mais son caractère obsessionnel lui apparaît bien rapidement aussi manifeste que sa relation avec Sofia est absconse : fraternelle, amicale, fusionnelle, romantique, excessive, monomaniaque, et fatalement, tout ce qu'il s'en suit. 

 

Pulse : photo, Elsi Sloan, Carmen KassovitzPetit lait (tourné)

 

À la folie

L'enjeu est délicat en matière d'équilibre, néanmoins, la cinéaste peut se reposer sur ses deux interprètes principales. Il est incontestable qu'Elsie Sloan et Carmen Kassovitz partagent une alchimie naturelle, et que celle-ci participe largement à l'enchevêtrement organique de leur relation à l'écran. Le fait qu'Elsie et Carmen soient par ailleurs jeunes et méconnu.es du grand public joue également en faveur de leurs personnages – et pardonnera quelques manques de justesse ponctuels.

Le spectateur ne manquera par ailleurs nullement de remarquer l'application avec laquelle Aino Suni a solidement construit chacune des deux filles, de sorte que l'intrication de leurs deux personnalités n'en soit rendue que plus évidente. L'intrigue comme la mise en scène s'appuyant diligemment sur les codes du thriller psychologique, le déploiement progressif de ce rapprochement jusqu'à un simulacre de concubinage ne peut qu'augurer d'inévitables débordements.

 

Pulse : photo, Elsi SloanIn tenebris

 

La co-dépendance entre Elina et Sofia s'observe aussi bien sur le plan physique qu'émotionnel, tant et si bien que tous les autres personnages s'évaporent peu à peu du récit comme de l'image, dont la colorimétrie perd en saturation. Il semble n'y avoir aucun futur possible pour ces deux jeunes filles, aucun de sain, toujours. Néanmoins, il semble également qu'aucune autre alternative ne soit réellement envisageable. Pulse n'est pas réellement une histoire d'amour, du moins, pas une que l'on puisse entendre au sens commun.

Avec son scénario teinté d'une indéniable ambiguïté morale, le film comme la cinéaste cherchent à comprendre pourquoi les individus sont-ils si enclins à se détruire les uns les autres, pourquoi certains désirs virent à la compulsion. En ce sens, on pourra déplorer que la fin, sciemment équivoque, manque un tantinet de panache par rapport au reste de l'intrigue. La toxicité apparente d'Elina ne suscite ni introspection, ni remords, ni remise en cause, pas plus qu'elle ne lui causera de tord, là où elle détruira pleinement sa soeur. Mais parfois, ainsi va la vie.

 

Heartbeast : Affiche officielle

Résumé

Sinistre sans être malade, contagieux sans être infecté, Pulse est un premier long-métrage sous-tendu par des thématiques fortes, une identité indéniable, et un sens de l'ambition qu'il s'agira de saluer. De quoi susciter la curiosité quant aux prochains projets de la cinéaste Aino Suni.

 

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Lecteurs

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commentaires
Miss M
22/02/2023 à 15:52

Franchement j'ai trouvé ce film tellement mal interprêté et mal écris. Les actrices et acteurs en font des caisses à commencer par les 1er rôles. C'est pétri de clichés insupportables vus 1000 fois dans ce type d'histoire. On est sur le récit d'ado pourris gâté(e)s nombrilistes et désoeuvrées humainement. Rien, du pseudo engouement d'Elina pour Sofia sur 3 entrechats mal esquissés à la manipulation de pacotille qu'elle exerce trop facilement sur cette dernière ne font mouche.
Ce film souffre trop de la comparaison avec Milla de Shannon Murphy, où là les jeunes acteurs font preuve de sobriété autant que d'emportement virtuose.

Cidjay
22/02/2023 à 13:13

Pas sûr d'avoir vraiment compris ce que le film a à raconter, mais je pense que c'est pas ma scène...

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