500 mètres sous terre : critique au fond du trou

Clément Costa | 26 septembre 2022
Clément Costa | 26 septembre 2022

Succès majeur au box-office sud-coréen, le film catastrophe 500 mètres sous terre de Kim Ji-hoon débarque enfin chez nous en édition physique et en VOD. Casting prestigieux, gros budget, est-ce que le spectacle est à la hauteur des promesses ?

Toi, tu creuses

De Tunnel à Exit en passant par Pandora, le cinéma coréen a développé ces dernières années une réelle fascination pour le film catastrophe. Le cinéaste Kim Ji-hoon était d’ailleurs un des premiers à relancer cette mode grâce au succès colossal de son The Tower en 2012. Avec 500 mètres sous terre, il reprend donc du service en terrain conquis.

Et s’il y a bien une spécificité qui permet au genre de se démarquer en Corée du Sud, c’est son envie de filmer des désastres à échelle humaine. Il n’est presque jamais question de sauver la planète entière d’une ère glacière, de météorites ou d’un calendrier maya. 500 mètres sous terre se concentre ainsi simplement sur les résidents d’un petit immeuble. Ce choix apporte un réalisme relatif franchement rafraichissant, à l’opposé de la débauche apocalyptique classique à Hollywood.

 

500 mètres sous terre : photoDon't look down

 

Autre point qui fait très souvent toute la force du cinéma sud-coréen, Kim Ji-hoon utilise un genre divertissant pour développer un propos politique acerbe et ludique. Parmi les différents thèmes abordés, on retiendra notamment la pression sociale autour de la réussite professionnelle ou encore le culte du paraître. Les personnages du film évoluent dans un monde qui ne se fie qu’à l’image extérieure, ils passent leur temps à jouer la comédie même lorsqu'ils reçoivent des amis pour un repas.

Le cinéaste évoque également la problématique d’un marché de l’immobilier au bord de l’implosion alors qu’en parallèle chaque employé modèle se doit d’être propriétaire pour gagner le respect de ses pairs. On citera notamment une séquence en milieu de récit lors de laquelle un personnage avoue n’avoir jamais confié son amour à celle qu’il aime parce qu’il n’est que locataire.

 

500 mètres sous terre : photoQuand tu reçois la révision annuelle du loyer

 

Six (hundred) feet under

Malgré toutes ses bonnes intentions, ce qui frappe d’entrée de jeu avec 500 mètres sous terre c’est son immense problème de rythme. Alors qu’on nous promettait du grand spectacle en continu, il faut attendre pas moins de 35 minutes avant que la catastrophe n’arrive enfin. Et ces 35 minutes initiales sont d’un vide absolu. Un enchaînement de séquences comiques tout droit sorties de Nos chers voisins. Rien que sur le premier quart d’heure, on endure le même gag poussif du voisin intrusif pas moins de quatre fois.

D’autant que la mise en scène ne vaut pas mieux qu’une sitcom de début de soirée. L’éclairage est catastrophique, le découpage étrange gâche toute tentative de trouver un tempo comique. Kim Ji-hoon semble tout aussi désintéressé que nous par cette introduction interminable et ne tente même pas d’y insuffler la moindre direction artistique.

 

500 mètres sous terre : photoAvoir la lumière à tous les étages 

 

On aurait au moins pu espérer que cette première demi-heure serve à caractériser les personnages principaux. Manque de chance, l’écriture est d’une telle lourdeur qu’on arrive à la catastrophe sans avoir la moindre attache émotionnelle envers qui que ce soit. Les acteurs font du mieux qu’ils peuvent, notamment l’excellent Cha Seung-Won (Man on High Heels) qui tire son épingle du jeu. Mais difficile d’ignorer à quel point Kim Sung-kyun semble nous envoyer des appels à l’aide, condamné au cabotinage.

Après avoir enduré ce long segment comique, on était en droit d’espérer un film catastrophe bien plus enthousiasmant. Ça n’est pas totalement le cas. La séquence d’introduction du désastre a de quoi refroidir. Même en tenant compte du budget, les effets numériques sont d’une laideur indéniable. La chute de l’immeuble aurait dû être un moment de tension captivant. Malheureusement, la mise en scène ne souligne ni le danger ni le vertige. Le cinéaste passe totalement à côté d’un jeu qui semblait évident sur les échelles de grandeur et de profondeur.

 

500 mètres sous terre : photoComment ça, je surjoue ?

 

Aller plus haut

Il serait cependant malvenu de résumer le film à l’échec de sa première heure. Après une bascule narrative bien pensée, 500 mètres sous terre dévoile une deuxième partie subitement mieux tenue. Le cinéaste se réveille enfin et fait preuve d'une vraie exigence technique. Il parvient même à retrouver l’équilibre entre humour et film catastrophe qui fonctionnait tant dans The Tower. La comédie se fait plus noire, plus cynique, collant à la fois au propos social et à la narration globale.

Même si le long-métrage n’évite pas des explosions larmoyantes de pathos, il parvient tout de même à susciter de l’émotion et à nous toucher à plus d’une reprise. On nous réserve même une véritable séquence-choc aussi frappante qu’inattendue au détour d’une péripétie qui semblait pourtant convenue. Lors de ses quelques moments de grâce, 500 mètres sous terre nous laisse entrevoir ce qu'il aurait pu être entre de meilleures mains.

 

500 mètres sous terre : photoOh hisse le précipice

 

Pour son dernier tiers, le film nous réserve même une longue séquence spectaculaire d’escalade. Kim Ji-hoon cesse de se reposer sur le tout numérique et livre une combinaison parfaite d’effets pratiques et de mise en scène ingénieuse pour créer le sentiment de danger tant attendu.

Dommage que le cinéaste finisse par retomber dans ses travers lors d’une résolution finale aussi improbable que forcée et qui traine inutilement en longueur. Au final, cette contradiction jusqu’à la dernière minute entre idées potentiellement brillantes et exécution inégale résume parfaitement l’étrange objet qu’est 500 mètres sous terre.

 

500 mètres sous terre : Affiche officielle

Résumé

Grâce à ses quelques moments de bravoure et une deuxième heure qui gagne en rythme et en intensité, 500 mètres sous terre parvient à être un divertissement décent à défaut d’être réussi. De quoi occuper une journée pluvieuse.

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commentaires
Serievore
01/10/2022 à 20:44

C est un bon film, ce serait dommage de l enterrer un peu trop vite.
Surtout que la suite, 501 metres sous terre est deja en preparation.

Cidjay
28/09/2022 à 08:22

Des coréens qui surjouent...
Ca me rappelle the Host.
Heureusement qu'il y a d'autres ingrédients dans ces films (scénario, effets spéciaux, rythme...), car, j'ai rarement vu des coréens jouer "juste" ( en tout cas selon nos codes occidentaux) . Mais chez eux, cest la norme, donc rien de choquant pour eux, et je dis acteurs coréens, mais je devrait plutôt dire asiatiques. Car les japonais ou les chinois ont souvent cette même façon d'interpréter des rôles selon leurs codes. Parfois ca passe bien, et dautres fois ca nous semble ridicule.

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